Ce que pourrait être une société démocratique (4/5)

samedi 30 avril 2016
par  LieuxCommuns

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III — Organisation générale

Les Communes, regroupant quelque 20 000 personnes, sont donc des organes politiques autonomes, inaliénables, mais cela ne peut vouloir dire qu’elles seraient isolées. Ce n’est qu’en projetant ce que « l’individu » contemporain croit être qu’il peut rêver à des communautés villageoises autarciques (cela pourrait sans doute advenir à la suite d’un bouleversement cataclysmique de la civilisation humaine, malheureusement pas improbable : telle n’est certainement pas notre perspective). C’est bien entendu tout le contraire : c’est parce que ces Communes sont autonomes qu’elles peuvent s’associer librement, de même que l’individu émancipé entretient des relations d’une force sans équivalent.

1 — Fédérations et Confédérations

La forme fédérative, sans cesse avancée par les mouvements anarchistes de la fin du XIXe siècle, est celle qui respecte le mieux le principe de l’association libre appliqué aux collectivités. Sœur mal aimée de la forme nationale, cette grande invention de la modernité, la fédération permet d’éviter la dispersion de la tribu et la domination impériale qui constituent si souvent la toile de fond implicite des projets de société.
Ce fonctionnement imposerait l’établissement d’institutions semblables à celles des Communes, mais appliquées à des échelles plus importantes — Assemblées Fédérales, Conseil Fédéral, etc. — et composées de délégués envoyés directement par chaque Commune. Le nombre de délégués et l’effectif de ces institutions dépendrait des nécessités, comme le nombre de points de vue à défendre et la complexité des problèmes à débattre.

L’intercommunalité
Il y aurait d’abord les regroupements, à n’importe quelle échelle, de Communes autour d’affinités, qu’elles soient culturelles, artisanales, professionnelles, artistiques, etc. Mais le premier degré d’association est fondé sur la proximité géographique, qui impose une collaboration autour de la gestion d’éléments biogéographiques communs (littoral, bassin versant, vallée, nature du sous-sol, risques naturels, nuisances industrielles héritées, etc.), d’infrastructures de grandes dimensions (transports, énergie, travaux importants, filières productives, etc.) ou de problématiques plus larges (entraide, logements, immigrations, etc.). Il existerait ainsi des Assemblées Inter-Communales regroupant quelques dizaines de communes, où seraient envoyés des délégués de chacune d’entre elles. Ainsi, pour un regroupement d’une cinquantaine de Communes embrassant un territoire correspondant à un million de personnes (l’équivalent de deux départements français), chacune enverrait soit deux délégués au sein d’une assemblée de 100, soit 5 pour une assemblée de 250.

Fédérations et Confédérations de Communes
Mais il y aurait surtout des Fédérations de Communes qui regrouperaient en fédération celles appartenant à un même territoire, suivant d’anciens principes dont les États-Unis, l’Allemagne ou la Suisse actuels ont gardé des traces plus ou moins visibles. Il est bien entendu impossible de déterminer les dimensions du territoire embrassé, qui dépendent de la réalité biophysique, mais plus essentiellement du rapport que les individus entretiennent avec cet échelon de la collectivité — en un mot s’ils s’y sentent appartenir. Il devrait être suffisamment grand pour que sa population ne soit pas trop homogène, et pour les mêmes raisons qui limitent le pouvoir des quartiers ; afin de créer des regroupements d’intérêts divergents pour que les conflits trouvent leurs résolution à la base, et ne se répercutent pas à plus grande échelle. Et il devrait être également assez petit pour que les séances des Assemblées, tenues à tour de rôle dans les Communes, soient accessibles à tous — l’idéal étant de pouvoir rallier ses différents points à pied en quelques jours. Ainsi, un territoire correspondant à trois régions françaises actuelles concernerait une population de 10 millions d’habitants.
Une telle Assemblée Fédérale composée par exemple de 1 000 délégués correspondrait ainsi à l’envoi de deux d’entre eux par Commune. Tirées au sort parmi les volontaires aptes et régulièrement renouvelées pour le Conseil Fédéral, ces délégations (avec observateurs) auraient des mandats limités puisque les questions à l’ordre du jour auraient été discutées et tranchées à l’avance lors des Assemblées Communales. Celles-ci leur fixeraient les charges des institutions fédérales, soit d’abord et avant tout celle de trier, sélectionner et dispenser au plus grand nombre les informations pertinentes de tous ordres, permettant des prises de décisions en connaissance de cause. Elles seraient ensuite chargées de la gestion des grandes infrastructures du territoire, des questions d’environnement et d’énergie, des conflits entre communes ou territoires, de la démographie, etc. Elles pourraient être également responsables d’une partie du financement et de l’encadrement des recherches scientifiques et de la vie culturelle, ainsi que du respect d’une partie de la législation confiée par les Communes, éventuellement sous la forme d’une Constitution. La Fédération aurait donc des institutions juridiques propres (première instance et appel) pour juger les crimes, par exemple.
De manière identique, au niveau confédéral existeraient des institutions semblables à l’échelle d’un pays actuel ou au-delà. Par exemple, pour un territoire regroupant 30 millions d’habitants, chaque Commune pourrait envoyer un délégué dans une assemblée de 2 000 personnes. Les charges de la Confédération seraient le respect d’une législation confédérale, le financement de certaines activités, et la défense du territoire. Mais la charge la plus importante à ce niveau serait la gestion de la monnaie, de l’économie, de la production et, essentiellement, les deux grandes décisions fondamentales de ce domaine, si elles n’incombent pas à des échelons inférieurs : la détermination de la part allouée à la consommation et à l’investissement d’une part, et celle allouée à la consommation publique ou privée d’autre part.
Un ultime échelon serait indispensable, au moins sous forme de rencontres régulières, pour traiter des questions mondiales relevant des échanges, de la diplomatie, des ressources et de l’évolution de la biosphère. Il semble difficile de maintenir, à ce niveau inter-Confédéral, les exigences formelles d’une démocratie directe, mais le petit nombre de décisions à y prendre, la solennité de cet échelon, et les enjeux qui s’y déroulent, devraient mobiliser l’attention de toutes les populations afin d’éviter toute dérive oligarchique.

2 — Démocratisation du travail

Ce fonctionnement démocratique engloberait bien entendu les sphères du travail, de la production et de l’économie. Ici comme ailleurs, le problème ne pourrait trouver de solutions pratiques que dans l’implication concrète de chacun : nous nous limitons à poser quelques jalons.

Un point préliminaire pour donner un cadre général à ce qui va suivre : alors que les utopies sociales depuis des siècles statuent sur une abondance matérielle enfin réalisée et une diminution drastique du temps de travail, nous nous situons dans une perspective inverse. Ce choix est motivé par tout ce qui précède et notamment, même si cela n’est pas synonyme de retour pur et simple à l’artisanat, par la remise en cause du modèle industriel tel que nous le connaissons. Mais surtout, in fine, par des arguments écologiques : la fin de l’énergie disponible à volonté (les seules véritablement inépuisables sont celles provenant du Soleil ou du manteau magmatique, mais leur utilisation massive aura de toute façon des limites liées aux moyens matériels de les capter) et l’épuisement des ressources minières remettent en cause le machinisme et les industries chimiques développés depuis trois siècles dans tous les domaines, qui avaient pris le relais des seules ressources et forces musculaires animales et humaines.

Il nous semble donc, à l’exact opposé des discours démagogiques qui postulent une mythique manne littéralement inépuisable pour promettre le « revenu garanti » sans contrepartie, la gratuité universelle ou l’abolition de la monnaie, que le travail humain reprendra sa place centrale dans l’existence tout en maintenant la production dans des marges limitées. C’est ce que nous appelons une société frugale : elle peut être vécue comme un retour du péché originel, nous préférons y voir le moyen de réaliser une civilisation adulte, stable et viable.

Relocalisation de la production
Il est d’abord clair que le principe de relocalisation devrait être généralisé : il est question bien entendu de limiter au strict minimum les transports de marchandises et de rapprocher, pour de multiples raisons, le producteur du consommateur. Il s’agit aussi de retrouver la diversité des savoir-faire locaux artisanaux et de renouer des liens avec l’environnement naturel, afin que les « savoirs savants » qu’imposent les problématiques écologiques soient contrebalancés par les « savoirs populaires » que les gens peuvent entretenir dans leurs activités avec les écosystèmes et les ressources naturelles là où ils vivent. L’agriculture est certainement le domaine où le « localisme » pourrait être largement développé, mariant les acquis « traditionnels » et les approches propres à la modernité, qu’il s’agisse de la diversité génétique animale et végétale, des cultures vernaculaires, des techniques alternatives, etc. Ce n’est pas l’autarcie qui est ici visée, plutôt l’utilisation au mieux de toutes les ressources disponibles in situ. Mais il y a également un intérêt politique : que chaque Commune puisse s’assurer un minimum d’autosuffisance concernant les biens de consommation vitaux et courants lui donne une certaine indépendance vis-à-vis de tous les autres pouvoirs, lui permettant de contrer toute tendance autoritaire qui viendrait à émerger dans les Communes alentour.

Reconstitution des unités de production
Cependant, le point central serait d’abord la reconstitution des centres de production. Car il ne s’agit plus du tout aujourd’hui d’exproprier « simplement » les possédants pour leur substituer une gestion collective et une égale répartition des richesses produites, tout en se félicitant de la destruction de pans entiers de l’appareil de production inutiles ou nuisibles : il s’agirait pour nous en même temps de reconstruire les filiales des moyens de produire utilement, aujourd’hui « délocalisées », c’est-à-dire vendues et perdues, et de réinventer toutes les techniques en tant qu’elles sont inséparables d’une organisation sociale particulière (que l’on pense aux chaînes de montage ou aux caisses de supermarché — ou aux supermarchés eux-mêmes). On peut certes se réjouir de la convergence providentielle de ces deux aspects, mais c’est oublier la disparition d’innombrables savoir-faire accumulés par l’Occident depuis des siècles.
Le deuxième problème est bien sûr celui que recouvre le vocable « écologie », c’est-à-dire l’altération essentielle de l’environnement « naturel » : épuisement des sols ou pollutions durables, manque d’eau ou appauvrissement génétique, zones irradiées ou submergées, etc. Enfin, il s’agirait de déterminer au niveau fédéral ou confédéral les ressources fossiles (gaz, pétrole, charbon, terres rares...), écologiques (sites de biodiversité, ressources en eau, terres arables, littoral...) ou patrimoniales (culturelles, historiques...) dont peuvent disposer librement les communes (abusus) de celles qui doivent être co-gérées par un ensemble plus vaste, donc laissées tantôt en droit de jouissance (fructus), tantôt en droit d’usage (usus). Car il ne peut davantage être question de considérer la totalité des ressources naturelles terrestres comme bien de l’humanité (qui est-ce ?) que de laisser chaque localité maîtresse absolue de toutes ses richesses disponibles. Il y a là un problème énorme, non insoluble mais qui demanderait à être étudié sérieusement — et que les antiennes bruyantes autour des « commons » ne semblent même pas entamer.

Réinvention du travail
Venons-en à la question du travail proprement dit. Le marxisme a tellement chargé la sphère « économique » qu’il est difficile de retrouver l’impulsion première des mouvements ouvriers et anarchistes, qui était d’y instituer le pouvoir populaire.
Démocratiser le travail, c’est instituer l’autogestion et cela veut dire d’abord constituer des Assemblées d’Établissements regroupant toutes les personnes qui travaillent dans un même lieu, qu’il s’agisse d’une Administration Communale, d’une école, d’une usine, d’une université, d’une entreprise, d’une coopérative agricole, artisanale ou artistique, d’un centre de presse, d’un hôpital, etc. De manière similaire aux Communes, un Conseil d’Établissement assurerait la gestion des affaires courantes. Les charges de ces Assemblées et Conseils seraient d’organiser le travail et la production et de se prononcer sur tout ce qui y a trait, en coordination avec les autres Établissements d’un même secteur d’activité au niveau fédéral et confédéral, et en accord avec l’assemblée communale. Organiser la production, c’est-à-dire rétablir les ambitions syndicales originelles — depuis longtemps abandonnées au profit des seules augmentations de salaires — à savoir la concertation démocratique sur ce qui est produit et comment. Il s’agirait de décider des procédés de fabrication, de la qualité et de la composition des produits, pour élaborer, enfin, des objets et des outils robustes, réparables, réutilisables et recyclables. Inutile de marquer davantage le contraste d’avec la camelote à obsolescence incorporée que sont les produits de masse contemporains, qu’il faut bien appeler capitalistes.
Cette autonomie de la sphère du travail serait donc limitée au niveau d’un établissement de par son appartenance à une filière particulière, et à ce niveau par les décisions des Communes, souveraines sur leur territoire.
Il n’y aurait donc pas d’indépendance proprement dite de la sphère « productive » vis-à-vis du pouvoir politique, l’individu s’exprimant tour à tour en tant que citoyen, là où il vit, et en tant que travailleur, là où il travaille, mais bien interdépendance, tension et conflit, et, en dernier recours, subordination de la première au second. A l’inverse, une telle division du pouvoir ne doit pas surprendre : elle est l’apanage de tous les mouvements authentiquement démocratiques, et les Conseils ouvriers hongrois insurgés de 1956 la réinventèrent, jusqu’à maintenir l’existence des syndicats au sein de leur République de Conseils [1]. Peut-être cette distinction pourrait-elle progressivement s’effacer, mais l’état actuel de complexité des techniques de production nous le rend difficilement imaginable.

Libération du travail
Ici comme ailleurs, la liberté collective est inconcevable sans la liberté individuelle, la démocratie directe faisant de chacune la condition de réalisation de l’autre. Il s’agirait donc de rendre les travailleurs libres, c’est-à-dire bien sûr libres de choisir leur(s) travail(s), libres d’en changer, libres de trouver leur place dans des équipes et libres de décider de la manière dont elles s’organisent. Mais, en un sens plus profond, cette liberté n’est pas celle de fleurir son poste ou de ne rien faire de trop fatigant, mais bien de repenser les tâches à effectuer et les outils qui les permettent : il est question de faire du travail de chacun un lieu d’investissement, qui fasse sens dans l’existence d’un individu à un moment de sa vie, et où il puisse effectivement chercher le moyen de réaliser et développer ses possibilités. Les seules contraintes s’exerçant sur lui sont ici l’organisation du travail, c’est-à-dire l’égale répartition des tâches au sein d’une équipe, la discipline du travail collectif qui la rend possible, le niveau du revenu et le niveau de production — sur lesquels nous reviendrons. Objecter que, fort de cette liberté, chacun, et d’abord soi-même, restera à la maison regarder la télé, c’est avoir intégré, et projeter sur les autres, l’infantilisme dans lequel nous baignons : quel que soit le nom que l’on donne à l’activité qui porte littéralement nos vies, elle nous semble faire partie des besoins humains fondamentaux [2]. Les tâches pénibles ou délaissées, mais restées indispensables et non réductibles ou difficilement intégrables à d’autres tâches, seraient tout naturellement remplies à tour de rôle.

3 — L’égalité des revenus

Ce n’est qu’à cette condition qu’il est possible de parler d’égalité des revenus, c’est-à-dire d’équivalence de la rémunération du travail de chacun. Cette vieille idée du mouvement ouvrier a été largement oubliée depuis, et non sans dommage puisqu’il s’agit pour nous de la seule manière d’en finir réellement avec le capitalisme, c’est-à-dire avec la recherche de l’accumulation sans fin par l’investissement privé et la fascination pour le mode de vie des dominants.

Principes de l’égalité des revenus
L’idée est aujourd’hui admise d’un revenu minimum, et celle d’un revenu maximum fait son chemin (la première est sans doute déjà condamnée, la seconde probablement mort-née). On discute déjà de l’écart admissible entre les plus hauts et les plus bas revenus : de 1 à 200 ? 1 à 50 ? 1 à 20 ? 1 à 5 ? L’idée d’égalité stricte, discutée ailleurs, met à nu les arguments qui justifient l’écart lui-même [3]. Bien sûr, elle ne peut prendre sens qu’à condition de ce qui précède, c’est-à-dire à la fois la liberté réelle pour l’individu de s’engager dans un secteur, et l’autonomie du collectif de travail. L’égalité des revenus brise la soif d’accumulation et pousse à trouver ce qui, en ce monde, mérite effort et persévérance, qui est un des aspects de l’autonomie telle que nous la concevons. Prétendre que c’est faire perdre l’attrait de telle ou telle tâche revient à avouer qu’elle n’en a déjà plus et que seule la perspective d’un dédommagement la rend tolérable. On peut donc spéculer sur la future pénurie de médecins ou d’architectes, mais cela ne sert qu’à comprendre l’état de la médecine ou de l’habitat actuels, et les motivations de ceux qui en font profession.

Reste à se demander ce qui serait reconnu comme travail, donc rétribué, et ce qui ne le serait pas. Ce choix doit être fait à la fois par la collectivité des travailleurs concernés, qui en formule la demande, et par la Fédération. Ce critère de décision est évidemment meilleur que celui de la solvabilité des « clients » ou de la mansuétude d’un mécène, comme c’est le cas aujourd’hui, et nul doute qu’il serait plus judicieux. La chose semble entendue pour le soin et l’éducation des jeunes enfants, les études, les formations ou les retraites, mais devient plus problématique concernant le cas d’école des artistes, écrivains et intellectuels, cas limites qu’aucun système ne peut résoudre a priori [4].

Organisation de l’égalité des revenus
Comment organiser l’égalité des revenus ? D’abord cette égalité ne peut avoir de sens que si elle est la plus générale possible : la gestion des rémunérations doit donc être du ressort de la plus haute instance existante, fédérale ou confédérale. Ensuite, si elle est un jeu d’enfant à établir pour les travailleurs du secteur public, la question se poserait concernant le secteur privé, si tant est qu’une telle division existe encore : artisans, paysans, commerçants, petits producteurs, etc. Sans doute serait-il possible alors de niveler les revenus a posteriori : compenser les revenus insuffisants et prélever le trop-perçu. Un tel mécanisme imposerait certes un contrôle rigoureux, mais permettrait de rendre à l’argent son sens premier, celui de signe de l’échange, permettant de connaître les biens et services sollicités par la population, c’est-à-dire de faire jouer le marché.

4 — Régime de propriété

Avant d’en venir à ce dernier, arrêtons-nous sur la grande affaire historique de la propriété des moyens de production.
Si le travail doit être l’objet d’un investissement important pour le travailleur, les outils, les machines, les locaux seront transformés par chaque individu au sein de son équipe de travail. Cela entraîne-t-il nécessairement que ces moyens de produire, qu’il s’agisse du véhicule, du matériel de la salle de classe, de l’extracteur ou de la soudeuse, ou encore de l’imprimerie, appartiennent à l’Établissement plutôt qu’à la Commune, à la Fédération plutôt qu’au travailleur ? Rien ne permet de le postuler. La propriété collective n’aurait de sens — ou pas — que pour les gens concrets qui travailleraient dans cette société-là, comme l’obsession de la propriété privée n’est d’une telle importance pour le psychisme contemporain que parce qu’elle est investie de toute une symbolique de prestige, de pouvoir, etc. Les grands moments historiques où la démocratie a pu être partiellement établie (Grèce antique, révolution américaine...) se caractérisent par l’autonomie des petits producteurs indépendants, doublant l’inaliénable propriété des biens privés (à commencer par une maison et un lopin de terre) tant vis-à-vis du volontarisme étatique que des ingérences étrangères [5]. Le grand courant anarchiste ne s’y trompait pas, en revendiquant l’association libre des producteurs — la propriété de ceux-ci étant limitée à leur capacité de travail, et les salariés étant remplacés par des associés. A l’opposé, une propriété intégralement publique entraîne presque organiquement l’émergence d’une armée de fonctionnaires ou, dans tous les cas, l’existence d’une lourde administration. Au-delà de la dimension anthropologique fondamentale de la question, il apparaît donc clairement que le véritable clivage ne serait pas entre propriété privée ou publique, mais bien entre travailleurs poursuivant un but commun et ceux qui tentent d’utiliser à leur propre profit les moyens de toute manière collectifs qu’ils ont en charge.

5 — Marché et plan de production

La répartition des richesses pourrait s’effectuer selon trois modalités : le régime du don/contre-don (au niveau institutionnel, la gratuité), le marché et le plan. Leurs domaines respectifs ne peuvent être fixés à l’avance, ni ne seraient de toute façon établis une fois pour toutes, car ils dépendent d’une multitude de facteurs. Parmi ceux-ci la difficulté d’obtention des richesses ou de leur fabrication et l’intérêt collectif qu’elles présentent, qui renvoient à l’état de la société dans son ensemble compte tenu de ses choix et de ses conditions écologiques, technologiques, culturelles, existentielles.

Instaurer de véritables marchés
Tout autant que pour le travail, la question est incroyablement embrouillée concernant l’existence d’un marché. On ne peut ici qu’avancer quelques jalons. Il y aurait d’abord à dissiper la propagande massive soi-disant « anti-libérale », portée par une Gauche qui ne l’est en aucun cas, et plutôt deux fois qu’une : une première fois parce que la gauche ne croit échapper à ses tropismes totalitaires qu’en incarnant un libéralisme culturel qui sape toute possibilité de réelle critique du capitalisme [6]. Une seconde fois parce que le système économique actuel n’est « libéral » que pour les gogos (puisqu’Adam Smith ressuscitant supprimerait immédiatement, par exemple, cet immense appareil idéologique qu’est la publicité) et n’est « néolibéral » que pour faire croire au contribuable que les interventions permanentes de l’État auprès du secteur « privé » sont issues d’une théorie économique plutôt que de l’orchestration d’un pillage par l’oligarchie.
Il y aurait ensuite à distinguer très nettement avec F. Braudel [7] économie de marché — commune à toutes les grandes civilisations — et capitalisme — création essentiellement occidentale, mais esquissée par d’autres aires culturelles : Japon, Indochine, Islam, Inde, par l’intermédiaire des bourses surplombant et déterminant les foires traditionnelles. Le caractère parasitaire du capitalisme ne se développe qu’à partir de la création d’un private market, véritable contre-marché où prévalent les transactions confidentielles, les décisions arbitraires et la formation de longues chaînes de négociants. Les marchés traditionnels deviennent alors marché unique, émancipé du corps social mais étendant son emprise à tous les domaines. Ce n’est qu’à ces conditions que le marché, bénéfique pour quelques-uns, a été progressivement investi depuis le XVIe siècle du projet d’accumulation illimité en lui subordonnant tous les domaines, et particulièrement les éléments de la production comme la terre, le travail ou la monnaie. Ignorer ou se rendre incapables d’effectuer ces distinctions amène à condamner le marché comme synonyme de capitalisme, et à faire de tout souci de parcimonie économique une recherche effrénée et sans bornes de profit — les célèbres « eaux glacées du calcul égoïste » (à cette aune, le principe même de la domestication animale amène à l’élevage industriel, tout rapport sexuel est un viol déguisé et tout langage n’est que calomnie, diffamation, mensonge et insulte).

Pourtant, comme le formule K. Polanyi, « la fin de la société de marché ne signifie pas du tout l’absence de marchés. Ceux-ci continuent à assurer de différentes façons la liberté du consommateur, à indiquer comment se déplace la demande, à influer sur le revenu du producteur et à servir d’instrument de comptabilité, tout en cessant totalement d’être un organe d’autorégulation économique. » [8] En effet, dégagé de l’obsession accumulatrice propre à l’aire occidentale depuis cinq siècles, le marché constitue un indicateur précis singulièrement démocratique, pour peu que quelques critères soient remplis. D’abord qu’il soit subsumé, enchâssé dans la société et ses normes sociales, c’est-à-dire compris comme une institution humaine de part en part dont le fonctionnement repose sur le comportement de chacun, et non comme une « main invisible » venant transcendentalement auto-organiser de purs agents économiques [9]. Ensuite, que chacun puisse y bénéficier d’un égal pouvoir, comme chaque individu représente une voix à l’assemblée, condition pleinement et uniquement réalisée par l’égalité des revenus. Enfin, que son domaine soit explicitement restreint aux biens et services de consommation considérés et reconnus comme courants par la population. Ainsi conçus, ces marchés permettraient d’un côté de répondre aux besoins sociaux en qualité comme en quantité sans laborieuses concertations et, de l’autre, de compléter les revenus des artisans, paysans ou commerçants dont l’activité n’est pas viable économiquement, mais jugée d’utilité publique — tout en les invitant à trouver des solutions pour la rentabilité de leur travail le cas échéant.
L’existence d’un plan de production, donc d’une concertation la plus large possible visant une planification de la production et d’une anticipation de la consommation, serait par contre requise concernant les biens sophistiqués impliquant une filière de production complexe et requérant une énergie et des matériaux importants.

Principes et fonctionnement du plan de production
L’élaboration du plan de production pour plusieurs années reviendrait aux Fédérations ou aux Confédérations [10]. Elles centraliseraient les demandes des consommateurs pour les produits des secteurs primaire (agriculture, sylviculture, pêche et activités minières) et secondaire (productions industrielles ou artisanales) nécessitant une production à grande échelle, et en déduiraient la production à fournir en un temps donné pour chaque entreprise de chaque filière, suivant la capacité de production de chacune et les ressources disponibles. Ce plan serait ensuite soumis à chaque unité de production, qui proposeraient des amendements ou l’avaliserait. C’est ainsi que tous les citoyens pourraient voir le lien direct existant entre le travail de chacun et la consommation de tous : c’est par ce biais que serait décidé, en connaissance de cause, le taux de croissance ou de décroissance de la Confédération des Communes. Ces calculs pouvaient sembler, il y a plus d’un demi-siècle, fastidieux [11] ; il est aujourd’hui à la portée de n’importe quel ordinateur de puissance moyenne d’établir à grande échelle quoi doit produire quoi afin que la demande globale soit satisfaite, en fonction du temps de travail et des moyens globaux de production.

Prenons l’exemple de la fabrication de véhicules, quels qu’ils soient. Les usagers, individus ou institutions, d’un territoire donné en exigent un certain nombre pour les transports en commun ou ceux des professionnels (pompiers, ambulances, médecins, etc.). L’Administration Fédérale centralise ces demandes, ainsi que les possibilités de production communiquées par toutes les unités concernées : extraction et traitement des métaux, production et acheminement de l’énergie nécessaire, fabrication des composants, assemblage, transport, etc. Un ou plusieurs plans sont alors élaborés, et proposés : cela nécessitera telles importations, telle consommation d’énergie, telle quantité de métal, de bois, etc. en un certain laps de temps, donc un certain nombre d’heures de travail pour chaque entreprise. Et cela représentera, pour chaque commune où sont localisées ces unités de production, tant de pollution, tant de bruit, tant de déplacement, etc. Le plan serait amendé dans les différentes Assemblées Communales et d’Établissement puis renvoyé à l’Assemblée Fédérale, qui intègre les modifications, et le renvoie pour qu’il soit réexaminé ou définitivement adopté. Il faudrait, bien entendu, tenir compte des marges d’erreur, des pertes, des accidents, et de l’état des stocks.

On voit donc que, par le marché ou par le plan, la production s’adapterait à la demande, et non l’inverse comme l’a instauré la société de consommation. Quant à la nature de cette demande elle-même, elle ne peut qu’être la plus libre possible, compte tenu à la fois des possibilités de production et des critères collectifs retenus par la collectivité. Prenons un cas limite faisant abstraction de ces derniers [12] : si un individu désire acquérir un jet privé, qu’il en a les moyens, que les infrastructures existent pour sa fabrication, son fonctionnement, son entretien, etc., et que les travailleurs et les populations sont d’accord pour ce faire, compte tenu des nuisances et des bénéfices possibles pour la collectivité, il n’y a aucune raison pour ne pas le lui fournir. Idem pour celui qui veut manger des fraises en hiver.

Remise en cause de l’indépendance des Communes
La coexistence du marché et du plan (et, dans un autre registre, d’une part indéterminée de gratuité), ainsi que le maintien de productions exigeant des technologies complexes, ne vont pas sans poser des myriades de questions, certaines ne traduisant que la difficulté à se projeter dans un autre fonctionnement social, d’autres ne pouvant être résolues qu’en pratique, d’autres encore qui restent à poser et dérangent le projet ici présenté.
Parmi celles-ci, la nature et la gestion des échanges économiques et commerciaux entre Communes, l’héritage ou le surgissement d’inégalités entre elles, le degré et la nature des interventions des Fédérations et Confédérations dans ces processus. Établir, à cette échelle, une égalité stricte peut facilement déboucher sur une logique stérilisante, mais refuser tout principe de régulation globale condamnera à coup sûr des régions pauvres à une misère perpétuelle. Sans doute serait-ce là un rôle crucial des instances supra-communales : parvenir à aider ingénieusement chaque Commune à trouver des ressources propres, et prévenir à l’inverse tout surcroît de puissance de l’une d’entre elles, ou toute alliance en ce sens.

Plus fondamentalement encore se pose ici la question de l’indépendance réelle des Communes, ou plutôt du conflit entre leur indiscutable souveraineté politique et leur indéniable dépendance envers des mécanismes qui les dépassent largement, mécanismes ayant trait à l’économie, au commerce, à la production et à la redistribution des richesses elles-mêmes, qui ne peuvent que relever d’une plus grande échelle, régionale a minima. Bien sûr, de nombreux « crans d’arrêt » existent, décrits au fil de ces pages, mais il faut se demander sérieusement s’ils permettraient à quelques milliers de personnes de s’opposer efficacement à des processus qui en incluent dix ou cent fois plus. On dira qu’ici plus qu’ailleurs apparaît l’évidence de l’imbrication de ces domaines avec les choix de société fondamentaux : c’est en toute dernière instance la sobriété dans la consommation, ou sa possibilité, qui permettrait à la Commune d’assumer pleinement ses relations extérieures comme de faire sécession. Mais cette éventualité semble si difficilement applicable qu’il convient de se demander si le projet décrit dans ces pages ne devrait pas être entièrement revu dans une perspective différente, par exemple en s’orientant plutôt vers une souveraineté à plus large échelle (par exemple régionale) permettant de mieux faire coïncider les pouvoirs économiques et politiques. Il semblerait alors que le recours à des technologies de communication soit indispensable si l’on veut maintenir les principes d’une démocratie directe, mais ce sont alors toutes nos réserves sur les implications de celles-ci qui devraient être approfondies et précisées...

Décroissance et prédation
Quoi qu’il en soit, la démocratie directe n’est envisageable qu’en articulant étroitement besoins et désirs humains, volonté, possibilités politiques et état des techniques. Elle n’est par ailleurs compatible avec l’abondance qu’à condition de donner à celle-ci un autre sens que celui de profusion croissante de marchandises à obsolescence incorporée, à savoir la satisfaction de besoins limités, reprenant par là un principe des premiers âges de l’humanité [13].
Mais cette diminution volontaire, et tout compte fait inéluctable, de la production ne va pas sans poser d’énormes problèmes, étrangement jamais abordés par ses défenseurs [14]. Car l’amoindrissement de la puissance matérielle a toujours été synonyme, dans l’histoire des civilisations, d’une mise sous tutelle, sinon d’une annexion pure et simple, de la collectivité par ses voisins. Il ne fait aucun doute qu’une société faisant ce choix se désignerait immédiatement comme la proie de voisins moins scrupuleux. Point aveugle du discours décroissant, la question du rapport de forces, jusqu’à l’affrontement militaire, ne peut être prise à la légère. Les réponses traditionnelles qui invoquent le peuple en armes et/ou la défense civile mériteraient d’être largement reprises et approfondies, tant elles semblent renouer avec le meilleur de l’héritage militaire et démocratique occidental [15], de la célèbre phalange grecque à la méconnue et admirable contre-offensive que les Tchécoslovaques insurgés ont opposée aux chars russes [16]. Mais ces perspectives perdent de leur indéniable force au contact des réalités thermonucléaires, chimiques et bactériologiques, contemporaines et futures. Bien sûr, le catéchisme subversif voudrait que la révolution soit mondiale ou ne soit pas. Or elle ne l’a jamais été et il semblerait que les conditions de sa réalisation soient passées, la dernière occasion ayant peut-être été la fin des années 60... En attendant, il est fort probable que la guerre fasse partie de cette réalité à laquelle l’humanité n’a pas encore de réponse, même si nous pensons avoir décrit dans les pages précédentes une société mettant en œuvre tous les moyens aujourd’hui connus pour l’éviter, en permettant des résolutions pacifiques des tensions, conflits et crises.
Au-delà de la violence proprement dite, la question des techniques militaires se posera immédiatement lors de tout soulèvement à tendance révolutionnaire : si, comme le reconnaissait Orwell [17], le fusil pouvait convenir à des visées démocratiques, il est difficile d’admettre que l’utilisation de sous-marins, de chars et d’avions de combat n’induit pas la perpétuation de toute l’institution militaire et de son appareil productif, sinon de l’organisation de la société entière telle que nous la connaissons [18]. Il y a là une contradiction qui ne sera résolue qu’en pratique, celle-ci révélant au contact des réalités les visées ultimes des insurgés. Cela rejoint cette évidence que l’importance du rôle des militaires lors d’un épisode révolutionnaire est à l’exacte mesure du risque de l’instauration d’un pouvoir autoritaire. Évidence qui en amène une autre : qu’une révolution est bien plus l’aboutissement d’un très long processus de mûrissement de toute une population que le début d’un autre.

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Cinquième partie disponible ici


[1Voir « Ce que furent les conseils ouvriers hongrois », Socialisme ou Barbarie n° 21, 1957 [DNSI], ainsi que Claude Lefort, « Une autre révolution » in la revue Libre, 1977, p. 101 sqq.

[2Cf. par exemple les beaux passages d’E. Fromm dans Société aliénée et société saine, p.173 sqq., ou encore ceux de Simone Weil L’enracinement (1959 ; Gallimard, 1962).

[3Cf. pour une première approche C. Castoriadis, « La hiérarchie des salaires et des revenus », 1974, [DNSI] et, pour des fondements philosophiques, « Valeur, égalité, justice, politique : de Marx à Aristote et d’Aristote à nous », Les carrefours du labyrinthe I, 1979, Seuil.

[4Citons quelques possibilités pour les fonctions « intellectuelles » dont le travail ne serait pas reconnu : il devrait être possible à chacun de dégager assez de temps pour exercer une activité non rétribuée ou de s’associer à d’autres afin de la financer. Au niveau institutionnel, l’obtention de bourses pourrait relever d’un échelon relativement élevé. En dernière instance, l’exil possible dans la multiplicité des collectivités existantes devrait permettre à quiconque de pouvoir développer ses œuvres.

[5Cf. nos remarques à propos d’un texte d’un collectif sympathisant : « La démocratie peut-elle accepter l’existence de la propriété ? » [DNSI].

[6Sur ce point, on lira par exemple Les mystères de la Gauche. De l’idéal des Lumières au triomphe du capitalisme absolu (Climats, 2013) de J.-C. Michéa. Cf. n. 25.

[7Notamment l’excellente introduction que constitue La dynamique du capitalisme (1984, Flammarion).

[8La Grande Transformation : aux origines politiques et économiques de notre temps, chap. « La liberté dans une société complexe », (Gallimard, 2011) p. 341.

[9On voit là l’erreur fondamentale des « anarcho-capitalistes », certainement plus conséquents idéologiquement que la plupart des gauchistes libertaires puisque, vénérant une auto-organisation radicale, ils respectent à la lettre l’axiome thatchérien « la société n’existe pas ».

[10On retrouvera ici quelques similitudes avec les thèses présentées par Michael Albert dans Après le capitalisme. Éléments d’économie participaliste, (Agone, 2003). Sa lecture (particulièrement la partie qui donne le titre à l’ouvrage p. 117-151) fera rapidement apparaître au lecteur nos désaccords, fondamentaux, tant sur les présupposés anthropologiques hérités de l’anarchisme de Kropotkine que sur le maintien de la motivation individuelle par l’inégalité des salaires (justifiés par « l’effort »...) ou sa haine indéfectible du marché. La vision à la fois rousseauiste et économiciste qui y est développée est corrigée par S. R. Shalom, op. cit., qui rétablit, en fin de compte, une représentation politique en cascade, au milieu de réflexions dans lesquelles nous nous reconnaissons.

[11C. Castoriadis, Le contenu du socialisme, op. cit., p. 157 sqq.

[12Comme le fait systématiquement T. Fotopoulos dans Vers une démocratie générale..., op. cit.

[13Cf. Âge de pierre, âge d’abondance. L’économie des sociétés primitives de M. Sahlins (1972) et son excellente présentation par P. Clastres (Gallimard, 1976), [DNSI]. On aurait grand tort de considérer que cette frugalité organisée a été, et serait, incapable de dépenses « pures », somptuaires, festives, ostentatoires, soit « inutiles », « gratuites » ou « irrationnelles » : au contraire, la disparition de la société de consommation comme telle donnerait tout son sens à cette destruction volontaire de richesses, aujourd’hui honteusement réduite aux décharges publiques et au gaspillage généralisé.

[14Voir par exemple la critique par G. Fargette du livre de Matthieu Amiech et Julien Mattern Le cauchemar de Don Quichotte. Sur l’impuissance de la jeunesse d’aujourd’hui (Climats, 2006) dans Le crépuscule du XXe siècle, n° 16, été 2006 (DNSI).

[15Militarisme civique, discipline, autonomie, autocritique, rationalité... excellemment décrites par Victor D. Hansen dans Carnage et culture. Les grandes batailles qui ont fait l’Occident (Champs/Flammarion, 2010).

[16Voir « 1968 : Face aux chars russes, le peuple tchécoslovaque », Christian Brunier, 1983 [DNSI]. Encore faudrait-il extraire ces salutaires réflexions sur la non-violence de la gangue religieuse qui les a historiquement inspirées.

[17« Recension : Armies of Freemen de Tom Wintringham », 1940, Écrits politiques (1928-1949), (Agone 2009), p. 116 sqq.

[18A un degré qu’il est difficile d’imaginer. Il y aurait un travail (sérieux) à faire sur la manière dont les épisodes révolutionnaires de l’ère moderne ont esquissé une nouvelle institution militaire et les liens de celle-ci avec les techniques héritées, notamment en s’inspirant des travaux stimulants de V. D. Hansen, op. cit.


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