Ce que pourrait être une société démocratique (3/5)

vendredi 22 avril 2016
par  LieuxCommuns

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II — La Commune, institution de base

Nous posons donc la Commune [1] comme l’instance politique fondamentale, l’institution souveraine à la base de la démocratie directe, la source unique de souveraineté collective où s’élaborent et se décident les lois, la source d’où le pouvoir commun peut être délégué à d’autres organes, d’autres groupes, ou des individus.

Une révolution territoriale
Axer la vie collective autour de l’échelle communale impose cependant une révolution territoriale, puisqu’il s’agirait aussi bien de regrouper un nombre important de villes et de villages que de découper les agglomérations actuelles en unités plus petites, en même temps que d’une diminution progressive de leur population. Fixons l’effectif de ces communes autour de 15 000 à 20 000 habitants (plus de la moitié de la population française, par exemple, vit dans des villes à moindres effectifs) : cela n’est rien de moins que l’inversion radicale des dynamiques actuelles, où les villes tentaculaires s’épanchent et se muent en métropoles obèses et boulimiques au rythme de la désertification des campagnes, tandis que les hinterlands recueillent les rebuts de la mégamachine urbaine [2]. Ce sont les énormes mouvements des exodes ruraux que la France a connus entre le XVIIe et le XXe siècles qui seraient à renverser, alors qu’ils s’étendent aujourd’hui aux dimensions continentales, fracassant massivement les unes contre les autres des cultures millénaires — et les exacerbant. Il y a là, pour nous limiter au problème de la répartition de la population, une série de problèmes absolument énormes qui, s’ils ne sont pas insolubles, exigeraient des échelles de temps (et d’espace) qui étaient inconnues à nos prédécesseurs, sans même évoquer les facteurs culturels. Le tout premier étant le fait que les déportations massives de populations ont toujours été le fait d’une ingénierie sociale effectuée sous les meilleures intentions du monde — et sous des régimes « de gauche » [3] (il serait tentant d’y voir même la marque indubitable du spectre totalitaire qui hante cette dernière). Autre problème de taille, impossible à développer ici : la mobilité forcée des populations qui risque de découler des bouleversements écologiques à venir (hausse du niveau de la mer, amenuisement des cours d’eau, instabilité climatique, pollutions différées, etc.), difficilement compatibles avec une démocratie stable et une production élaborée.

1 — Les Assemblées Communales

Au sein de la Commune, c’est l’Assemblée Communale qui symboliserait et matérialiserait l’autonomie politique de la communauté.

La première question est celle de la taille de ces assemblées. Elles doivent, pour être légitimes, pouvoir regrouper une fraction significative de la population tout en permettant l’expression de toutes les opinions, la tenue de débats approfondis et la possibilité de décisions claires. La Pnyx grecque pouvait accueillir, dans sa première période, plus de 5 000 personnes. Les assemblées révolutionnaires des Temps modernes, des sections de 1789 aux conseils russes de 1905 ou hongrois de 1956, comptaient, elles aussi, plusieurs milliers de participants. Et les assemblées grecques du « mouvement des places » du printemps 2011 ont été constituées, un mois durant sur la place Syntagma à Athènes, de 4 000 à 8 000 personnes quotidiennement [4]. Si ces effectifs peuvent sembler exorbitants, c’est que la prise de parole et l’organisation collective sont des capacités anthropologiques aujourd’hui largement atrophiées par un mode de vie et un fonctionnement social où le monopole du pouvoir le dispute au narcissisme incontrôlé — c’est de ce point de vue que l’on peut facilement railler nos positions [5]. Pour l’individu contemporain, discuter librement de questions importantes à une vingtaine est un véritable défi. Il y a à réapprendre le B.A.-BA contre son propre ego : que les opinions n’existent pas en quantité infinie et qu’il n’est nul besoin de répéter ce que quelqu’un a déjà clairement dit ; que la prise de parole est une prise de pouvoir comme l’écoute est une prise de responsabilité, qui doivent toutes deux s’assumer ; ou encore que prendre connaissance du contexte, des tenants et aboutissants et des discussions précédentes est le préalable à toute participation ; etc. Il n’est pas question de morale, ici, mais d’histoire, et, surtout, de formation des individus. Car on ne peut que mesurer l’écart anthropologique qui nous sépare de cette espèce singulière qu’est l’ « internaute » contemporain et son narcissisme compulsif, pendant populaire des vociférations grégaires de nos abominables parlementaires. On trouvera ailleurs des récits d’assemblées authentiques, où rivalisent la sobriété, la concision et l’intelligence, dans la Russie de 1905, l’Espagne de 1936, la Hongrie de 1956, l’Athènes du Ve siècle av. J.-C. ou... la classe d’école primaire réunie en conseil de coopérative en 1967 [6].
Si l’on veut s’abstenir de faire appel à des techniques de communication trop sophistiquées, les assemblées communales souveraines ne peuvent donc compter beaucoup plus de 5 000 ou 7 000 participants simultanés [7], pour des communes de 15 000 à 20 000 habitants. Le rapport entre ces chiffres, en eux-mêmes discutables, mérite quelques explications. D’abord, tous les habitants ne sont pas habilités à siéger, soit par décision collective (âge légal, durée de résidence, condamnation, mandat, délégation...) soit par état de fait (malades, vieillards, au travail, absents, en voyage...) et rares seront les assemblées dont l’importance nécessitera la présence de tous. Ensuite, sans réintroduire subrepticement le principe de représentation, il est toujours possible de déléguer occasionnellement son pouvoir à un individu pour voter ou s’exprimer en assemblée à partir de l’ordre du jour. Enfin, et plus important, l’assemblée, pour centrale et symbolique qu’elle soit, est très loin d’être la seule institution démocratique, comme on le verra, puisque l’implication dans la vie politique revêt de multiples formes, institutionnelle ou non.

Rôles et fonctionnement
La première institution est évidemment cette assemblée, regroupant des participants en pleine possession de leurs droits civiques en âge et en condition, à un rythme qui pourrait être habituellement mensuel. Elle édicterait des lois, veillerait à leur application, contrôlerait l’administration et aurait en charge la gestion de toutes les questions relevant de l’intérêt public sur l’ensemble de son territoire, où elle serait seule souveraine.

Suivant un modèle classique depuis 1905 et d’inspiration anarchiste, l’assemblée désignerait en son sein (nous verrons plus loin tous les modes de désignation), pour le temps de la séance et comme il est souvent d’usage, un Bureau chargé de vérifier les mandats, du respect de l’ordre du jour, des prises de parole, des votes et de consigner les décisions prises. Tout aussi classiquement l’assemblée désigne, pour des tâches techniques et temporaires qui ne peuvent incomber à l’Administration Communale, des Commissions dont les membres révocables peuvent être tirés au sort ou élus en fonction des compétences requises. Elles rendraient évidemment des comptes à chaque assemblée, qui déciderait de leur maintien, de leur réorientation, du renouvellement de leurs membres ou de leur dissolution une fois la tâche effectuée.
Le principe d’égalité de la parole ne peut que s’affronter à diverses tentatives d’accaparement, soit par un orateur particulier, soit, ce qui est beaucoup plus problématique, par des groupes, des ligues ou des partis cherchant à imposer leurs vues. Si cette question a reçu des réponses radicales par le passé, elle ne pourra à l’avenir que faire l’objet de multiples débats et, en tant que machines oligarchiques orientées vers la conquête du pouvoir individuel ou collectif [8], ces regroupements ne peuvent qu’être amenés à disparaître d’eux-mêmes progressivement, par le simple fonctionnement institutionnel. Mais en tant que formations idéologiques, lobbies prétendant défendre les intérêts d’un regroupement social, professionnel ou culturel, leur pouvoir de nuisance serait à la hauteur de l’incapacité des assemblées à affronter les problèmes auxquels ils prétendraient répondre et ils devraient donc être compris comme les signes d’un affaissement des courants démocratiques. Les ripostes pratiques trouvées par les assemblées grecques de 2011 [9] mériteraient d’être méditées : chacun est libre de se regrouper comme bon lui semble dans la vie sociale (l’agora) mais au sein de l’assemblée (ekklesia), chacun ne peut s’exprimer qu’en son nom propre. Nous renvoyons par ailleurs à nos remarques sur les dispositifs permettant de combattre les prises de pouvoir lors des assemblées de luttes sociales [10].

Une assemblée électronique ?
On nous rétorquera que nos spéculations sont bien vaines, la profusion des « nouvelles technologies de l’information et de la communication » depuis une vingtaine d’années nous ayant libérés de la nécessité de nous rassembler physiquement en grand nombre [11]... Il faut d’abord remarquer qu’il nous semble au contraire que ces techniques permettant d’entrer en contact sans avoir de contacts font corps avec la société de masse qui contraint à l’opposé à cohabiter sans coexister, qu’elles se sécrètent l’une l’autre, tantôt pour échapper au troupeau aveugle, tantôt pour se fondre dans la foule solitaire. L’humain nous apparaît comme un animal social, dont l’humanité n’est envisageable que dans un creuset de relations concrètes, durables, engageantes et dont peu sont choisies. La politique, l’argumentation, le libre examen, la décision ne sont pas affaire d’informations immédiates ou de comptabilité des voix, mais bien de volontés, de responsabilités, d’angoisses, d’exaltations, de désirs et d’intelligences propres à chacun, bref de présence à soi et aux autres, éléments qui ne peuvent être délégués à quelques personnes particulières et a fortiori à des machines. Sans doute exagérons-nous un peu, mais comment ne pas voir le rapport proprement oraculaire que tout un chacun entretient aujourd’hui avec son moteur de recherche, ou les distorsions des notions de temps, d’espace, d’organisation qu’Internet et les « téléphones » portables provoquent... Le lecteur nous citera l’excellent exemple de Wikipedia : qu’il en compare alors, une seule et unique fois, le meilleur article en ligne et son équivalent dans l’Encyclopædia Universalis pour prendre la mesure de ce qui semble définitivement perdu. L’investissement magico-religieux de la technique est une délégation de pouvoir pleine et entière, et marche de concert avec un gouvernement représentatif. Il nous semble qu’une démocratie directe ne saurait faire reposer son fonctionnement sur des technologies sans mesurer, en permanence, les effets et les implications qui en découlent — à moins de fuir et de se fuir en tant qu’entreprise hautement humaine.

2 — Les institutions communales

Pour centrale qu’elle soit, l’Assemblée Communale serait loin de posséder tous les pouvoirs. Mais les représentants actuels, lorsqu’ils sont élus, échappent totalement au contrôle populaire et constituent une caste auto-cooptée qui entretient les gens dans la passivité. A l’exact opposé des sociétés occidentales d’aujourd’hui qui exigent instamment l’apathie du « citoyen » pour pouvoir fonctionner [12], une société démocratique favoriserait, encouragerait, et reposerait sur, la participation du plus grand nombre. Cela signifie des institutions à la portée de tous, simples, compréhensibles et modifiables, fonctionnant dans le quotidien de chacun pour l’intérêt public en encourageant l’égalité et l’autonomie de l’individu.

Le Conseil
Si l’Assemblée a plutôt un rôle législatif, l’organe exécutif de la Commune serait le Conseil, constitué de quelques centaines de personnes siégeant quotidiennement, dont la désignation pourrait se faire par tirage au sort (voir plus loin). Son rôle principal serait donc d’assurer les fonctions de gouvernement entre deux assemblées en gérant les affaires courantes, de veiller à l’application des décisions, et de contrôler l’Administration Communale. Il convoquerait également les Assemblées Communales et les Assemblées Communales Extraordinaires, préparant les séances plénières en recevant et examinant les propositions de lois soumises par n’importe quel individu, rédigeant les comptes rendus de séances et actant les listes de mandatés, veillant à la constitutionnalité ou la non-contradiction des lois votées, accompagnant le travail des Commissions. Son organisation interne reprendrait globalement celui de l’Assemblée. Il y aurait lieu de s’inspirer de la Boulê athénienne qui, dotée d’une sorte de droit de veto, pouvait également imposer la remise en discussion solennelle d’une décision lorsque celle-ci semblait avoir été prise sans considération par une assemblée sous l’influence d’un démagogue ou d’une émotion particulière. Sa tâche étant absolument centrale, le Conseil devrait être particulièrement contrôlé, ses membres régulièrement renouvelés et ses réunions, publiques. Pour la même raison, il devrait être soumis au contrôle strict de l’assemblée, et ses membres corrompus devraient être passibles de poursuites judiciaires (cf. plus bas).

Fonctionnement du pouvoir judiciaire
Dans les utopies libertaires ou socialistes, la question de la justice était souvent très rapidement réglée : la pauvreté une fois éradiquée, la chose se réduisait à de simples médiations. Sans réfuter une telle proposition, son angélisme pour le moins maladroit se révèle incidemment criminel lorsque le raisonnement est poussé jusqu’à traiter tout délit ou crime sur le registre psychiatrique — que divers régimes « de gauche » ont largement pratiqué. Nous tenons la possibilité de la transgression et de la violence, qu’il s’agisse de l’infraction ou du crime, pour indissociable de la liberté humaine, et devant être traitée comme une de ses manifestations. Autrement dit, la question de la justice, de ce qui est juste et de ce qui ne l’est pas, restera encore et toujours grande ouverte, peut-être d’ailleurs plus que jamais, interrogeant les responsabilités de l’individu comme les valeurs et l’organisation de la collectivité. Reste que, comme cette dernière, le fonctionnement de cette justice reposera sur des bases radicalement différentes.
Autant que l’Assemblée et le Conseil, les tribunaux, cours de justice et juridiction d’appel de la commune travailleraient en totale indépendance. Les jurys populaires, comme les actuels jurés d’assises, seraient tirés au sort pour une durée déterminée, et leurs votes motivés par écrit. Il n’existerait plus de magistrats professionnels, le personnel encadrant, président, procureur et avocat, étant désignés parmi la population, par exemple par tirage au sort, pour une durée plus ou moins importante selon les tâches afin de permettre un temps de formation et de passage de relais. On verra plus loin que le pouvoir judiciaire communal peut s’inscrire à l’échelle fédérale ou confédérale.
Ces simples mesures révèlent à elles seules la révolution copernicienne opérée par la démocratie directe : elles impliquent que chaque citoyen soit effectivement à même non seulement de connaître et de comprendre la loi, mais également de la faire appliquer dans chaque cas particulier — ainsi que de considérer que n’importe qui doit être en capacité de le faire. C’est dire que les lois ne sont en rien l’apanage de spécialistes usurpant la volonté collective comme aujourd’hui, mais qu’elles sont véritablement une création populaire, et culture à part entière, donc auto-éducation du peuple, non seulement dès l’enfance, mais tout au long de la vie. Il y aurait donc évidemment en amont un extraordinaire travail de simplification du corpus législatif à partir de l’actuel, accompagné d’un énorme tri tel qu’il a pu être effectué par la Constituante dans les années 1790-1794. On mesure ici pleinement la distance à parcourir pour que la direction de la société, donc la société elle-même, aujourd’hui monopole exclusif de quelques corporations « expertes » auto-cooptées monopolisant la loi comme le droit, devienne l’œuvre de toute la population.

Comités de quartiers et de hameaux
Une instance à plus petite échelle occuperait des rôles particuliers : les Comités de quartiers et de hameaux. Leur fonctionnement serait un modèle simplifié de celui des assemblées communales, sur les mêmes principes égalitaires. Ils pourraient avoir trois principales fonctions, en siégeant aussi fréquemment que nécessaire, par exemple de manière hebdomadaire.
D’abord ces comités pourraient permettre en amont le travail de l’Assemblée et du Conseil, en dispensant l’information nécessaire à la compréhension de tous les débats prévus, en expliquant et discutant les lois et mesures en débat comme celles déjà votées, en élaborant des amendements, des motions, en proposant des discussions autour des grandes questions en cours ou en pré-examinant les propositions de lois qui leurs seraient éventuellement soumises. Leur deuxième fonction serait de faire le lien avec les Assemblées et Administrations Communales : relais de l’expression des besoins locaux spécifiques (travaux, budget, services...) d’un côté et organe d’application des décisions prises par la commune de l’autre. Il s’agirait notamment de les placer au centre des décisions relevant du cadre de vie, de l’architecture et de l’urbanisme. Leur dernière fonction serait la formalisation de celles que remplissent, de fait, avec plus ou moins de bonheur et de manière embryonnaire, les réseaux de connaissances qui relient les voisins : assurer la régulation de la vie locale, régler les conflits entre riverains, organiser fêtes et manifestations, décider des aménagements urbains et locatifs, gérer localement les institutions de solidarité, etc.
Autant le rôle de ces comités serait fondamental dans la vie quotidienne, autant leur pouvoir politique serait fortement limité. La raison en est simple : la taille modeste de ces comités les rend particulièrement vulnérables à l’apparition de pouvoirs de type charismatique. Mais il s’agit surtout d’éviter que ne se forment durablement des groupements d’intérêts convergents qui instrumentaliseraient le pouvoir pour leurs seuls objectifs. Le problème était connu des Grecs, qui regroupaient en sous-ensembles (les Dèmes) les régions urbaines, campagnardes et côtières afin qu’aucune ne puisse se constituer en groupe de pression. Certes, la ségrégation spatiale des quartiers aujourd’hui poussée à l’extrême n’aurait plus de raison d’être en régime démocratique, mais rien n’indique que de tels processus de distinction ne se reforment d’une manière ou d’une autre sur des critères professionnels, familiaux, ethniques ou religieux, par exemple.

3 — Dispositifs de contrôle du pouvoir

Assemblée, Conseil, Tribunaux ou Comités, quels que soient les noms qu’on leur donne, sont des institutions qui ont existé, en tant que telles ou partiellement, durablement ou pour quelques semaines, au sein de peuples cherchant, voulant et exerçant leur souveraineté. Leur caractère démocratique réside dans le principe fondamental du refus de la division du travail politique, c’est-à-dire de l’abolition de la différence entre ceux qui décident et ceux qui exécutent. C’est la disparition pure et simple des professionnels de la politique, chacun étant amené à prendre en charge des responsabilités politiques en étant financièrement indemnisé le temps d’un mandat. Ce principe s’incarne dans différents dispositifs mobilisés au cas par cas en fonction des nécessités pratiques rencontrées, d’où notre volontaire imprécision.

Indivision du travail politique, mandats et révocabilité
Il y a d’abord la rotation systématique des tâches, qui oblige chacun à suivre de près les affaires en cours, comme elle exige du délégué une prévenance quant à la situation qu’il laisse entre les mains de son successeur, en même temps qu’elle rend très difficile le clientélisme. Concernant les organes permanents, il suffit de renouveler régulièrement une partie plus ou moins importante des délégués afin que cette rotation ne contredise pas la nécessaire continuité de la tâche, par exemple pour les membres du Conseil ou le personnel d’une Administration. De même, on peut limiter à des degrés variables la reconduction d’une même personne à un même mandat, ou obliger à les prendre en charge dans un ordre de complexité croissante, et bien entendu interdire tout cumul de mandats importants. Ce n’est ici qu’une caractéristique classique du partage a minima du pouvoir dans les sociétés ayant rompu avec le pouvoir absolu, mais que l’on radicalise simplement à toutes les tâches relevant explicitement du domaine politique.
Deuxième dispositif, la nature des mandats eux-mêmes tels qu’ils sont donnés aux délégués, qu’ils soient ponctuels (Bureau, délégation) ou à plus long terme (Conseil, Tribunaux). Il y a lieu ici de s’inspirer des pratiques anarchistes, déjà préconisées par Rousseau, mises en œuvre à grande échelle lors de la Commune de Paris et en Catalogne en 1936-1939. Alors que le cirque électoral est aujourd’hui un véritable chèque en blanc donné à un individu, ou plutôt à son clan, tout mandat démocratique doit être nominatif, clair et limité. Un délégué communal envoyé à l’Assemblée Fédérale ou Confédérale, par exemple, doit savoir exactement ce qu’il doit y faire : tenir la position fixée par ses mandataires, voter telle décision, s’opposer à telle autre, poser tel veto, se permettre tels compromis, tels accords, puis rapporter le contenu des échanges. Il est évident que la précision d’un mandat dépend de la qualité des échanges dans l’assemblée qui mandate : un délégué doté des meilleures intentions du monde ne pourra jamais être fidèle à un engagement confus émanant d’une assemblée démissionnaire. Qu’elle exige un investissement à plein temps ou qu’elle soit compatible avec le maintien de l’activité professionnelle, une mandature plus longue, comme celle concernant le Conseil ou les Tribunaux, sera nécessairement plus libre mais toujours soumise à la reddition des comptes.
Il y aurait enfin la révocabilité des délégués, telle qu’elle a par exemple été officialisée lors des premiers moments de la révolution russe de 1917. Toute personne mandatée devrait pouvoir être démise de ses fonctions en cas de non-respect de son mandat ou de changement radical de la situation requérant une nouvelle mandature, ce qui empêche les manipulations trop évidentes ou les fautes importantes. Cette révocation devrait pouvoir être demandée par n’importe qui puis soutenue par un nombre significatif de personnes afin d’être examinée.

Tirage au sort et vote
Quant à la désignation elle-même des mandataires, le tirage au sort semble être le dispositif démocratique par excellence, puisqu’il engage n’importe qui, en ce que quiconque peut être nommé — et « représenté » — par un autre n’importe qui. Selon les circonstances, le tirage au sort peut concerner tout le monde, les volontaires seuls, ceux qui n’ont pas encore été désignés, ceux qui ont déjà dû assumer une tâche importante, une partie de la population, etc. Par exemple, la désignation du Bureau de l’assemblée peut ne concerner que ceux qui n’ont pas prévu d’intervenir durant la séance. A l’inverse, la convocation aux jurys populaires doit pouvoir concerner tout le monde a priori, adressée dans chaque ensemble le cas échéant (quartiers, par exemple, ou profession, ou tranche d’âge). Il revient donc à l’Administration et au Conseil de tenir à jour des registres, d’où l’on retire les gens déjà nommés, mais également les impossibilités (maladies, voyages, travail...) ou les privations de droits civiques.
Quant au vote « classique », il serait réservé à la désignation de personnes remplissant des fonctions techniques, étant entendu, d’une part, que ce genre de tâche n’est pas exécutable par tous, et, d’autre part, qu’il est possible à chacun de juger de la fiabilité et de l’efficacité de l’individu concerné.
Cette articulation tirage au sort / élections fut institutionnalisée dans la cité d’Athènes, après les réformes de Clisthène. Bien qu’Aristote considérât cette désignation par le hasard comme le principe même de la démocratie (en opposition à l’oligarchie élective), elle fut totalement oubliée tant par la Rome antique que par les courants de la modernité [13] — qui cantonnèrent le tirage au sort à la désignation de certains jurys.

Accessibilité des assemblées et devoir d’intervention
D’autres dispositions permettraient également d’exercer un contrôle sur les représentants, comme l’accessibilité des assemblées, c’est-à-dire leur ouverture à n’importe quel observateur, lui-même délégué ou non [14]. Il serait également possible de systématiser le rôle des observateurs, suivant les expériences d’interventions psychosociologiques [15] : chaque assemblée pourrait ainsi accueillir en son sein une délégation « étrangère », c’est-à-dire constituée de personnes issues de communes, de régions ou de provinces n’ayant a priori aucun intérêt particulier à y défendre. Leur rôle serait de renvoyer à la collectivité une image d’elle-même qui lui permette une réflexivité : il s’agirait alors de dénoncer les corruptions, les accointances, les ententes, de faire part de fonctionnements et d’expériences qui se déroulent ailleurs, de déranger les représentations convenues, de pointer les failles, les tabous et les allants-de-soi, bref d’aider la communauté à élucider son imaginaire propre. Sans aucun pouvoir, mais avec le devoir d’une absolue liberté d’expression, les membres de cette délégation seraient protégés au plus haut niveau, et leur rapport diffusé à grande échelle. D’une manière plus générale, il s’agirait également de favoriser les voyages, dans la mesure des moyens de transport alors disponibles : il y aurait lieu, loin du tourisme actuel qui se limite à un déplacement physique réservé à l’élite mondiale, de remettre l’hospitalité traditionnelle au centre de la vie publique. C’est ainsi que l’on rencontre encore facilement, dans les zones d’Afrique les moins « développées », des « maisons de voyageurs » où sont offerts au tout-venant, pour quelques jours, le gîte et le couvert, échangés contre le récit de ce qui se passe ailleurs.

Les Tribunaux politiques
Les Tribunaux politiques jugeraient exclusivement des affaires traitant des mandats politiques concernant les instances officielles, des cas de trahison, de corruption, de sabotage, etc. Les condamnations iraient d’amendes à des privations de droits civiques pour une durée plus ou moins longue (l’atimie grecque) ou même à l’exil (ostracisme). D’une manière générale, celles-ci devraient être plus sévères concernant tous les cas de manipulation des procédures à d’autres fins que l’intérêt commun. Constitués de jurés tirés au sort, délibérant et décidant au secret, ces tribunaux pourraient être saisis par n’importe quelle personne, y compris morale. En Grèce Antique [16].

A l’échelle de l’individu
Essayons de récapituler l’investissement exigé par un tel fonctionnement au niveau communal pour un habitant quelconque. Pour fixer les idées, on peut estimer aux environs de 500 le nombre d’habitants se trouvant simultanément en charge d’un mandat communal, quel qu’il soit, répartis entre le Bureau de l’assemblée, le Conseil ou les différents Tribunaux. A l’échelle individuelle, le nombre de fonctions officielles différentes occupées dans une vie pourrait être d’une trentaine et correspondre, en cumulé, à deux à trois années de mandature passées dans les instances communales.
On verra qu’à cela s’ajoutent celles requises par l’organisation fédérale et confédérale, qui sont bien moindres rapportées à l’individu, mais surtout celles qu’exigent l’organisation du travail, certainement aussi prenantes. Au final, il est possible d’avancer que chaque habitant d’une Commune aurait à passer au cours de son existence entre cinq et dix ans en mandatures officielles (selon qu’elles soient à plein ou à mi-temps), réparties grosso modo en une centaine de charges différentes, sans évoquer la participation aux différentes assemblées ou les activités publiques propres à chacun. Ces estimations sont certes quelque peu spéculatives, mais elles permettent de comprendre la manière dont l’organisation et le fonctionnement social feraient partie intégrante de la vie quotidienne.

4 — Refus de la régression individuelle et collective

Toutes ces institutions, ces principes et ces dispositifs ne garantiraient pas le pouvoir du peuple : ils le favoriseraient, selon nous, à un degré inconnu dans l’histoire. Forgés par une population en effervescence, rien, si ce n’est l’activité du peuple, ne les empêchera jamais de perdre progressivement leur sève populaire pour se transmuer peu à peu en organes oligarchiques.
Il est vain de chercher le facteur premier du retrait des gens des processus de décision ou de l’implication croissante d’un petit nombre dans la marche de la collectivité : aucune prise de pouvoir ne se fait sans la passivité, sinon le consentement, du plus grand nombre, et tout désintérêt à l’égard de la chose publique appelle automatiquement une concentration des charges sur quelques futurs spécialistes, quelquefois à leur corps défendant. C’est ce processus d’oligarchisation, sans cesse présent, sans cesse renaissant, qu’affronte toujours toute collectivité démocratique. Dire que la démocratie véritable est l’implication du peuple dans ses propres affaires est une tautologie qui manque souvent l’essence d’un tel régime. Car cette autonomie ne peut être qu’un choix, sans cesse mis en doute et en déroute par le retour permanent des processus d’aliénation, la prégnance des schémas millénaires où prévalent la croyance, l’obéissance, l’inégalité, le conformisme, la résignation et la peur.

Il faudrait, ici, synthétiser tout ce qui a été dit sur le type anthropologique de l’Athénien antique, du révolutionnaire anglais, américain ou français, de toutes les composantes sociales du « mouvement ouvrier » du XIXe siècle. Contentons-nous d’en reformuler l’un des fondements, l’acceptation d’une vie vécue dans une visée d’égalité, sous un angle rarement évoqué, celui du désir de puissance. Loin des rêveries libérales-libertaires désormais omniprésentes, il est établi aujourd’hui que l’être humain n’apparaît comme tel qu’à travers un processus de socialisation, c’est-à-dire de rupture, violente et en un sens jamais achevée, avec la toute-puissance infantile du sujet [17]. Toute-puissance évidemment fantasmatique, qui resurgit tout au long de l’existence sous la forme d’une exigence démesurée et monstrueuse de satisfaction permanente des désirs, de totalité et permanence du sens, d’abolition du temps et finalement de dénégation acharnée de la mortalité. Structure fondamentale de l’être humain, ce projet de maîtrise absolue s’exprime bien entendu dans la sphère publique, et particulièrement sous la forme de la domination : qu’est-ce que l’ascension hiérarchique, sinon, sous cet angle, la volonté de prendre l’ascendant sur d’autres adultes, alors considérés comme inférieurs simplement parce qu’autres ? Il ne s’agit pas ici de postuler une indifférenciation des individus, une identité/similarité — mais les talents, fussent-ils ceux de leader, ne peuvent être rabattus sur l’établissement de relations de domination, d’asservissement, et finalement d’infantilisation. La faculté, que l’on dirait innée pour certains, de décider pour d’autres, c’est-à-dire le don de nier la liberté et l’altérité humaines, n’est pas un talent, c’est une psychopathie, que l’on décèle sans mal dans les sphères de « décideurs ». On peut alors comprendre, à la suite du mythe freudien du « pacte des frères » de Totem et tabou, l’égalité entre les individus comme un refus collectif de la régression : Non, tu ne te serviras pas de nous ni de nos institutions pour mettre en scène ton fantasme de puissance et de contrôle ; nous, adultes, nous ne prendrons pas place dans les rôles confortables et dégradants que tu veux nous faire jouer et que nous provoquons ; la jouissance de la régression infantile n’a pas à instrumentaliser la collectivité et nous ne pouvons qu’essayer en permanence de vivre ensemble notre destin. Prise en ce sens, l’égalité est l’acceptation profonde de notre humanité, sans cesse à inventer, et oriente fondamentalement le sens de l’existence. On voit ici la formation psychique profonde que requiert l’autonomie collective, en même temps que son implication personnelle qui résonne jusqu’au cœur de l’intime solitude du sujet.

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Quatrième partie disponible ici


[1On ne s’étonnera pas de trouver tout au long de ce texte des termes tout à fait communs, qu’on dirait choisis pour leur banalité, pour désigner des institutions démocratiques. Nous préférons, de loin, ne pas « chercher trop loin quelque mot éclatant » même pour désigner une nouveauté radicale, plutôt que d’appeler « Commissaires du Peuple » ceux qui, finalement, ne se sont avérés être que de nouveaux, et sinistres, ministres.

[2Cf. Christophe Guilluy Fractures françaises, (Bourin 2010, repris en Champs Essais).

[3Que l’on pense aux atrocités staliniennes, et notamment à l’installation de colons russes à l’Est de l’Ukraine après le génocide des années 1930, à l’exclusion et à la fuite massives qui ont suivi la victoire du FLN algérien, ou aux rôles maintenant joués par l’immigration contemporaine en Europe. Cf. G. Fargette, Le crépuscule du XXe siècle, n° 27-28, avril 2014.

[4On lira « Récit d’un participant sur la place Syntagma » ainsi que « Les assemblées générales de Syntagma : Structure et fonctionnement », dans notre brochure n° 18, Le mouvement grec..., op. cit. Pour une discussion autour des difficultés extraordinaires pour les mener à bien, on lira dans la même brochure « Les réalités grecques aux prises avec les exigences de la démocratie directe » ainsi que « Enjeux politiques et anthropologiques du mouvement grec pour la démocratie directe », dans la brochure n° 18 bis Le mouvement grec..., op. cit.

[5Par exemple Daniel Mothé qui, dans « La grande démocratie et la petite démocratie » (revue Esprit, juillet 2006, p. 35-53), fait un éloge tout à fait pertinent des petites assemblées populaires comme celles des syndicats de copropriétaires, et souligne le savoir-faire des gens gérant leurs propres affaires en opposition avec la grande rhétorique des meneurs de foules et les procédures d’exclusion des militants ès « expertises politiques ». Mais son refus de voir dans cette autogestion (relative) des petits groupes l’enracinement d’une démocratie directe à élaborer à plus grande échelle est particulièrement mystérieux sans faire référence à des partis pris idéologiques évidents — et, pour le cas de Mothé, issus d’un parcours politique singulier qui le fit passer du groupe Socialisme ou Barbarie au parti « socialiste » de M. Mitterrand & Co.

[6On lira ainsi respectivement, en parallèle, Léon Trotsky, 1905, p. 97 ; Gaston Leval, Espagne libertaire 36-39, (1971, éd. Du cercle) p. 221 sqq. (passage disponible sur notre site) ; Socialisme ou Barbarie n° 21, p. 91-92 [DNSI] ; Gustav Glotz, 1928, La Cité grecque, (rééd. Albin Michel, 1968) p. 169-173 ; Aïda Vasquez & Fernand Oury, De la classe coopérative à la pédagogie institutionnelle, (Maspero, 1971) p. 463 sqq. [DNSI].

[7Bien entendu, des lieux ad hoc devraient être construits mais des succédanés pourraient déjà être facilement aménagés : stades et salles de concerts ou de spectacles, églises et cathédrales, synagogues et mosquées, entrepôts et hangars, amphithéâtres et gymnases, places centrales et halls de marché, etc.

[8Cf. l’inoxydable travail de Robert Michels Les partis politiques. Essai sur les tendances oligarchiques des démocraties, (1911 ;UB lire, 2009), qui s’est malheureusement trouvé sans postérité autre que conventionnelle dans les sciences sociales autant que chez les militants, hormis quelques exceptions notables comme celle de Georges Lapassade dans « Bureaucratie, bureaucratisme, bureaucratisation », 1978 [DNSI].

[9Cf. Le mouvement grec pour la démocratie directe..., op.cit.

[10Cf. notre tract « Pour des assemblées générales autonomes », octobre 2010.

[11Cette logique nous semble avoir été poussée à l’extrême par un camarade ne proposant rien de moins que des assemblées générales continentales, soit à plus de 200 millions au bas mot, menées par « interconnexion télévisuelle » (http://www.initiativedemocratique.org/). A l’opposé, d’autres suggèrent que les assemblées de tous niveaux ne dépassent pas... 25 personnes ! (... en rétablissant, forcément, un système hyper-représentatif... Cf. S. R. Shalom, « Parpolity : Political Vision for a Good Society », « Politique participaliste. Vision politique pour une société souhaitable », trad. du collectif La Fabrique des futurs, Antigone, Grenoble, com. pers.).

[12Moses I. Finley, 1976 ; Démocratie antique et démocratie moderne, (Payot, 2003) p. 47 sqq. S’il semble certain qu’il s’agisse là d’une caractéristique universelle de tout État historique (on sait qu’Ibn Khaldûn en fit la dynamique même des cycles civilisationnels — cf. G. Martinez-Gros, Ibn Khaldûn et les sept vies de l’Islam, (Actes Sud, 2006)), les sociétés modernes l’auraient radicalisée, au point d’en faire une injonction fondamentalement contradictoire, en exigeant à la fois l’apathie et la participation, notamment dans la sphère du travail (C. Castoriadis, Le mouvement révolutionnaire sous le capitalisme moderne, 1961, repris aujourd’hui dans Écrits politiques 1945-1997, Tome II, La Question du mouvement ouvrier, Sandre, 2012). La comparaison que C. Castoriadis opérait avec l’état névrotique trouve son prolongement naturel dans les psychopathologies contemporaines, cf. C. Dejours, Souffrance en France, 1998.

[13Voir, pour la première, M. I. Finley, L’invention de la politique, (1983 ; Flammarion, 2011) et, pour les seconds, Bernard Manin, Principes du gouvernement représentatif, (Flammarion, 1995).

[14Inutile, bien entendu, de souligner dans ce cas l’utilité éventuelle de certaines techniques de communication.

[15Cf. Les méthodes de l’intervention psychosociologique de Gérard Mendel, Jean-Luc Prades, (La Découverte, 2002).

[16Sur tous les dispositifs grecs, on se reportera à l’inégalé La Démocratie athénienne à l’époque de Démosthène de Mogens H. Hansen (1993 ; Tallandier, 2009.])], ils permettaient aussi de condamner une personne ayant proposé une loi qui s’était révélée, après son vote, être illégale (graphê paranomôn). Ils pouvaient également traiter, d’abord à l’amiable, les cas d’absentéisme répété ou malvenu aux assemblées lors de séances importantes ou, a contrario, d’investissement excessif. Il y a dans ces exemples une illustration exceptionnelle de l’auto-éducation d’un peuple qui ne compte pas sur la vertu spontanée de l’individu — autant qu’une grande source d’inspiration [[On évoquera également les innombrables dispositifs mis en place par les sociétés dites « primitives » pour contrôler les tentatives individuelles d’accaparement du pouvoir, si bien décrits par Pierre Clastres (La société contre l’État). Mais cette évocation, en opposition totale au courant primitiviste protéiforme, ne peut se faire sans la rattacher à l’hétéronomie profonde de ces mêmes sociétés. On lira à ce sujet « La confusion occidentale », mai 2012, Malaises dans l’identité, brochure n° 13, p. 64-66, en particulier la note 4, p. 65.

[17Voir C. Castoriadis L’institution imaginaire de la société, p. 429 sqq. ou Gérard Mendel « La double spécificité somatique et psychique » in La révolte contre le Père (1968, Payot, p. 31-61) [DNSI].


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