Une polémique d’une autre époque (1/2)

mercredi 14 mars 2012
par  LieuxCommuns

Texte extrait du bulletin de G. Fargette, « Le crépuscule du XXe siècle », n°23 - 24, novembre 2011

Il concerne la polémique lancée contre nous par M. Y. Coleman

Ni Patrie ni Frontières attaque le collectif Lieux communs et C. Castoriadis

Un tel préambule permet d’éclairer la portée d’une polémique étrange et dérisoire récemment intentée au collectif Lieux communs par Y. Coleman Voir ici, auteur de la publication Ni patrie ni frontières (reprise sur le site mondialisme.org). Cette polémique a été lancée à l’occasion de la publication d’une première brochure de Lieux communs sur les événements de Tunisie, brochure dont Y. C. affecte de faire un éloge de principe pour mieux disqualifier ses auteurs, selon le vieux procédé paternaliste des groupuscules gauchistes : ce que vous faîtes est très bien, mais je vais vous expliquer pourquoi vous avez tout faux.

Y. Coleman semble particulièrement offusqué par l’éventualité que des Tunisiens d’origine, liés à Lieux communs, pourraient être disposés à se distancier de l’islam et vouloir utiliser certaines références de liberté dont l’Occident a été la source depuis quelques siècles au moins. Y. C. ne se situe plus exactement sur le registre idéologique habituel du marxisme. Il est influencé par des théories très particulières sans y faire explicitement référence dans son attaque (ce point est abordé dans “Le moteur du stalino- gauchisme“, pp.10-13). Il conserve avant tout des “méthodes”.

Il se trouve que divers textes du Crépuscule ont été reproduits, il faudrait dire, “publiés”, aussi bien par Ni Patrie ni Frontières (en 2003-2004, à propos du conflit sur l’Irak, ou sur le radicalisme abstrait) que par le site Lieux communs, mais de façon plus suivie dans dernier ce cas. Cela ne les engage ni les uns ni les autres, le rapport étant à chaque fois un rapport d’éditeur à auteur, même si les convergences entre le Crépuscule et Lieux communs sont suffisantes pour considérer qu’il y a là au moins un langage commun.

Le Crépuscule, tout en se trouvant extérieur à cette polémique trouble, est en mesure d’apporter un éclairage sur ses tenants et ses aboutissants. L’important n’est pas tant l’existence d’un “désaccord” entre Y. Coleman et Lieux Communs, que les méthodes et le ton employés. Y. Coleman s’empare de quelques lignes anodines dans une présentation de brochure au fond strictement descriptive pour faire tonner la grosse artillerie idéologique. Cet accès de mauvaise humeur, très “commissaire politique”, va bien au-delà d’une simple friction de sensibilités. Un tel éclairage permet de mettre en perspective les idéologies qui ne cessent de stériliser le domaine de l’expression publique en France et dans toute l’Europe car Y. Coleman s’avère d’un schématisme erratique extrêmement révélateur. Il affirme le fonds de ses positions avec une franchise que ses collègues savent en général éviter. Il s’inscrit dans un héritage stalino-gauchiste dont il ne parvient pas à s’extraire, alors que les gens de Lieux communs y sont étrangers. La référence à C. Castoriadis les aide beaucoup, bien évidemment, puisque Socialisme ou Barbarie, qui se distinguait mal de l’héritage bolchevique au moment de la scission de 1949 avec le parti trotskiste, a effectué un indiscutable travail de bilan et qu’il a rompu sans retour avec cette tradition sinistre. C. Castoriadis est un de ceux qui ont fourni les éléments de la critique la plus acérée sur le sujet.

Les événements en cours en Tunisie et dans les autres pays arabes, ainsi que les conséquences concrètes de l’immense crise économique et financière, ne peuvent que donner à Lieux communs l’occasion de se confronter à des situations concrètes cruciales, même si elles ont de grandes chances de s’avérer décevantes.

Le caractère délibérément inachevé des positions de ce collectif souligne au mieux le type de divergence avec un Y. Coleman qui, sous des phrases d’ouverture formelle, n’a nullement abandonné la posture d’assurance impérieuse et factice des léninistes de toujours, même quand ils ne s’appuient plus sur un groupe hiérarchisé. Comme on le voit dans le résumé de son attaque (pp. 4-5), il mène sa polémique non avec des arguments mais avec des insinuations et des amalgames. Quoi que réponde Lieux communs, Y. C. multipliera ses accusations plus vite qu’ils ne pourront jamais les réfuter. La méthode du stalino-gauchisme est assez simple : elle consiste à puiser dans un moralisme manipulé, et à déverser des attaques en vrac contre tout ceux qui ne se rallient pas. Dès que surgit l’insinuation fétiche de ces gens (le soupçon de “glissement vers l’extrême-droite”, qui est leur accusation en sorcellerie), il ne s’agit pas de décrire honnêtement une position pour en rendre compte. Cette posture se veut prophétie auto-réalisatrice. Il s’agit pour eux de provoquer ce qu’ils déclarent observer. La plupart des accusations contemporaines de ce type se conforment à cette caractéristique. Il serait naïf de n’y voir qu’une gesticulation.

Elles constituent une méthode de sabotage préventif du terrain même où pourrait se déployer un débat fertile et honnête.

Paris, le 22 septembre 2011


Une polémique d’une autre époque

(ou le passe-temps d’un chasseur d’une “extrême-droite” fantomatique et intemporelle)

Y. C. commence par qualifier de “libertaires” les gens de Lieux communs, c’est-à-dire en fait de “non-marxistes”, car il manque délibérément de précision dans ses qualificatifs. Il affirme que Lieux communs a publié une “excellente” brochure (factuelle) sur les événements de Tunisie, mais que ce collectif utiliserait des considérations “anthropologiques” particulièrement douteuses.

Les quelques remarques de Lieux communs sont en réalité si prudentes que Y. C. doit leur attribuer un maître à penser, C. Castoriadis, qui serait “de plus en plus à la mode” auprès des intellectuels, etc. (Y. C. ne serait pas du tout un “intellectuel”)... Tout son exposé vise au fond à dissuader quiconque serait tenté de lire cet auteur.

Y. C. commence par un rappel indigent sur l’histoire du groupe “Socialisme ou Barbarie”, dont C. Castoriadis fut l’un des fondateurs, et conclut qu’à partir des années 1970, ce “penseur” ayant “déserté” l’action politique aurait collaboré avec la bureaucratie de la CFDT puisque deux ou trois de ses textes ont été publiés dans la revue de cette centrale syndicale, sur le thème devenu alors diffus de “l’autogestion”, thème que SouB avait défendu bien avant tout le monde, depuis les années 1950. Y. C. constate que les textes de C. Castoriadis ont aujourd’hui trouvé un certain public “libertaire” (cela l’inquiète un peu sans doute), où l’on essaierait de “récupérer” Castoriadis en passant sous silence cette prétendue “collaboration [1].

Y. C. se lance ensuite dans une description tendancieuse des positions castoriadiennes, en utilisant le style reconnaissable de sa propre famille politique, Lutte Ouvrière (“les propos de comp- toir de Casto”). Celui-ci aurait même osé laisser publier un entre- tien dans une revue de Francs-maçons, dont la référence n’est pas fournie, où il tiendrait des propos sur la laïcité qui seraient “proches du discours de droite ou d’extrême-droite”. L’accusation en sorcellerie moderne est lâchée, seule façon de liquider symboliquement ce gêneur. Il est à noter que, pour le coup, Y. C. se réfère aux conditions d’adhésion à la IIIème Internationale qui avait interdit l’appartenance à la Franc-Maçonnerie (alors qu’il ne s’agirait ici nullement d’une “adhésion”, mais d’un “entretien”), et cet interdit est présenté comme un “acquit” du “mouvement ouvrier”.

Y. C. reproche à C. Castoriadis d’avoir osé faire quelques remarques sur certaines caractéristiques anthropologiques propres aux sociétés dominées par l’islam. Il s’indigne de ce que Castoriadis ait osé “prendre position” (en émettant quelques banalités de base) sans être un spécialiste de ce domaine. Il alignerait les poncifs “pseudo-laïques”, etc. Y. Coleman poursuit sur le même ton relevé (“dis Casto, les “Arabes” et les “musulmans”, y pensent vraiment tous pareils ?”).

Y. C. se livre ainsi à une dénégation pathétique d’un fait massif (la non-dissociation du religieux et du politique dans l’univers musulman), opère quelques tours de passe-passe (la Russie stalinienne serait une expression de “l’Occident”, ce qui ferait quelque peu bondir les Russes eux-mêmes, sans même parler des spécialistes académiques du domaine de l’histoire russe), confond allègrement avec le mouvement historique d’émancipation toutes les tendances à la régression qui ont pesé en Occident depuis 1914 et qui ont précisément ravagé le versant que C. Castoriadis défend dans la civilisation occidentale.

Y. C. utilise une technique stalino-gauchiste caractéristique : se poser en “spécialiste de la non-spécialisation”, et parler depuis ce surplomb commode et incantatoire pour dénoncer selon l’occasion aussi bien ceux qui ne sont pas “spécialistes”, que ceux qui le seraient (et qui s’enfermeraient donc dans une discipline étroite). Il est à noter que cette “spécialité de la non-spécialité” est l’un des traits fondamentaux de toutes les formes bureaucratiques, depuis la Chine mandarinale jusqu’aux technocrates étatistes occidentaux. L’affinité de la pose marxiste avec ce type d’imposture sociale est lourdement significative.

Y. C. se livre ensuite à une interprétation méticuleusement malveillante de quelques remarques de Lieux communs, qui s’enfermerait dans le “marais de l’essentialisme” (thématique favorite des idéologues de l’islam politique, voir T. Ramadan, qui vise à disqualifier tout effort d’analyse générale de la part d’Occidentaux). Y. C. considère que le mouvement ouvrier (qu’il disait à l’origine de sa propre publication vouloir présenter dans sa diversité) a rencontré les mêmes difficultés que les révoltes anti-occidentales, notamment arabes, etc. Il oublie d’une part l’immense auto-transformation du mouvement ouvrier au cours du XIXème siècle (jamais une classe dominée n’avait à ce point pu modifier le sort qui lui était fait) et affecte d’autre part de considérer que les diverses stations de la régression historique commencée en 1914, poursuivie en 1939, etc., expriment la réalité fondamentale de ce même mouvement ouvrier. Une idéologie bolchevisante est indifférente aux contradictions logiques qu’elle ne cesse de proférer.

Comme Lieux communs mentionne la critique du consumérisme, Y. C. dénonce avec une horreur feinte cette considération, selon une technique ordinaire à la sphère marxiste, attachée à un productivisme aveugle hérité du XIXème siècle positiviste : la critique du consumérisme serait le fait d’“intellectuels nantis”, accusation qui ne manque pas de sel quand on a une petite idée des statuts sociaux respectifs d’Y. C. et des membres de Lieux communs.

Y. C. couronne son exposé par ce qui semble être son argument principal (il faut dire son credo) : il n’y aurait jamais eu de laïcité en Occident. Le fantasme de dieu n’y aurait donc jamais été évacué de l’espace public, position qui aura de quoi interloquer les idéologues islamistes, toutes variantes confondues, puisque leur principal reproche envers l’Occident est précisément cette disparition. Mieux, les dictatures espagnoles, portugaises, etc., des années 1930-1960 auraient démontré l’incapacité de l’Occident à toutes les époques à séparer religion et politique !

Y. C. affirme son dédain du mouvement ouvrier pour sa faiblesse vis-à-vis du stalinisme et du nazisme (il a oublié le fascisme italien), mais là aussi selon un retournement étrange de causalité : à ce compte, les colonisés seraient responsables de leur colonisation. Il oublie soigneusement de rappeler le rôle du marxisme mutilé par le bolchevisme dans l’établissement du premier régime totalitaire de l’histoire, et escamote la complicité de la IIIème Internationale dans la victoire du nazisme en Allemagne (il ne peut l’ignorer puisque ce fut l’un des thèmes centraux des mises en garde de L. Trotski tout au long des années 1930).

Y. C., toujours spécialiste en non-spécialité, se livre ensuite à un vague exposé didactique sur la différence entre Islam (comme civilisation) et islam (comme religion). Il escamote la réalité effarante du statut de dhimmi (statut inférieur fait aux non-musulmans dans tous les variantes de l’islam), et reprend quelques poncifs du discours caractéristique du parti diffus de l’impérialisme musulman, reconnaissable à la position selon laquelle l’islam serait voué à conquérir le monde puisqu’il aurait bénéficié d’une éphémère prédominance géopolitique il y a plus de mille ans ! Avec une confusion aggravée, commune à tant d’intellectuels qui se disent de “gauche”, Y. C. pousse le coup de force jusqu’à ramener l’originalité occidentale (qu’il nie par ailleurs) à une influence de l’islam sur l’Europe ! Il semble ignorer que même un Averroès fut totalement marginalisé en son temps par les “docteurs de la foi” et qu’aucun des “grands intellectuels de l’islam” n’a jamais été capable de lire les auteurs grecs dans le texte (les traductions furent le fait de lettrés araméens chrétiens qui lisaient le grec et pratiquaient l’arabe !). Derrière cette forfaiture, il y a la volonté de réduire l’influence de l’antiquité grecque sur l’Europe à une médiation arabe, comme si Aristote était ignoré des Byzantins de Constantinople ou de l’Italie du Sud (hellénophone au cours du Moyen-âge), et n’avait pas commencé à atteindre les lettrés occidentaux dès les XIe et XIIe siècle, parce que ceux-ci les recherchaient passionnément, déjà. Y. Coleman ne se demande surtout pas pourquoi les “penseurs” musulmans ont fait un si piètre usage de l’héritage grec. Mieux, il semble incapable d’imaginer que la filiation d’une civilisation à une autre passe moins par des textes que par des héritages sociaux (tels que le rôle assumé par les villes, les habitudes juridiques, les moeurs, bref des institutions). Et que l’influence entre civilisations contemporaines peut jouer à rebours : il est clair que, tout au long de leur antagonisme (quatorze siècles), islam et Occident ont beaucoup fait pour se distinguer l’un de l’autre (ce fut la raison avouée de certaines décisions fondatrices attribuées à Mahomet, déjà), et que cela continue. Il est tout de même curieux de constater que les partisans d’une tolérance niaise aux atteintes musulmanes des libertés européennes sont souvent les mêmes qui approuvent de façon automatique les revendications de liberté individuelle de plus en plus déterminées qui prolifèrent en Occident. Il suffit de citer les récentes "marche des salopes" (slutwalks), ou l’évolution vers le mariage gay, pour comprendre que l’on tient là deux manifestations qui apparaissent aux musulmans bon teint, et pas seulement aux islamistes excités, comme d’intolérables provocations. L’extension de l’athéisme et de l’indifférence religieuse parmi les populations d’origine européenne confirment que la divergence civilisationnelle se poursuit sous nos yeux.

Y. C. sort, en passant, un lapin de sa poche en mentionnant qu’il existerait un immense corpus de chroniques chinoises qui seraient ignorées de l’Occident (les Chinois ne semblent guère pressés de les faire connaître, mais Y. C. est d’un flou complet sur le sujet). Il serait intéressant de savoir si un seul de ces textes présente le même intérêt que la Guerre du Péloponnèse de Thucydide, véritable fondateur d’une méthode d’analyse historique que l’Occident moderne a retrouvée et utilisée beaucoup plus tard. Faire la distinction entre “chroniques” et histoire serait-il trop subtil ?

Dans son effort désespéré pour nier l’originalité de la culture grecque, Y. C. considère qu’elle n’a pu que subir des influences. Il évacue le point fondamental : toutes les civilisations de l’Ancien monde se sont mutuellement influencées (le bouddhisme chinois n’est, par exemple, pas imaginable sans la métamorphose que cette foi religieuse a subie lors de son passage par l’Afghanistan hellénisé), mais elles reposent toutes sur des moments de création, qui ne se réduisent pas aux déterminations des influences qu’elles ont reçues, parfois recherchées. L’influence égyptienne sur la Grèce antique est ainsi fortement sous-estimée, mais l’essentiel demeure que les anciens Grecs ont fait quelque chose de foncièrement nouveau à partir de ces transferts de connaissance, de techniques, de conceptions, etc.

Y. C. reste agrippé aux schémas marxistes les plus fondamentaux : l’histoire devrait être déterminée de façon positiviste. Elle ne connaîtrait pas cette part d’indétermination qui provient des capacités de création humaine, où les effets ne se réduisent pas aux causes qui servent de déclencheurs et de germes. C’est précisément tout le contentieux entre le marxisme et la réflexion de C. Castoriadis.

Le procès intenté à celui-ci continue, Y. C. affirmant sur le ton du reproche sententieux : “aucune civilisation n’est pure ou supérieure aux autres”, mais ce pourrait être précisément une phrase de C. Castoriadis ! Y. C. est si peu avare de tours de passe-passe qu’il soutient que le ”débat Droit civil/droit divin (charia)” n’aurait jamais cessé en islam. Il n’explique pas pourquoi il a toujours fini par être tranché dans le même sens. Il cite, de façon involontairement pathétique, le cas de Mahmud Mouhammad Taha, mais pour admettre qu’il a été condamné à mort en 1985, et bel et bien exécuté  ! Voilà une conception très bolchevique du “débat”.

De fait, Y. C. utilise une technique de confusion typique des marxistes acculés : transformer toute question en champ de mines pour que ne surnagent finalement, à l’usure, que les vestiges d’une croyance dont les références seraient hors de discussion. Là encore, l’héritage du stalino-gauchisme des années 1970 est écrasant.

Y. C. pousse l’acrobatie argumentaire jusqu’à reprocher aux marxistes “en pays d’islam” d’avoir échoué face à l’islamisme. L’idée de progrès, cette fois indiscutablement occidentale, y aurait été dévastatrice. Ces marxistes pris en étau entre les dictatures et les organisations islamistes ont été balayés, mais Y. C. oublie là encore de constater que ces marxistes avaient reçu leur idéologie à l’époque de sa sclérose et de son déclin (surtout par le biais du communisme moscovite) et qu’ils ne s’intéressèrent à elle que dans la mesure où elle reproduisait les valeurs instrumentales, qui appartiennent bien à l’Occident, mais pas à son versant favorable à l’émancipation.

Y. C. termine en assénant la tarte à la crème de la “complexité des choses”, après avoir tenté de pulvériser par son exposé confusionniste tout ce qui pourrait servir de point de repère fertile. Il se permet même de dénoncer les “marxistes” qui veulent faire de l’islam la “religion des pauvres” (il n’est pas à une coquetterie près) et critique les “philosophes” qui croiraient à la “supériorité” de la civilisation occidentale, calomniant indirectement une dernière fois C. Castoriadis.

Paris, le 15 août 2011

Seconde partie disponible ici


[1Ce couplet sur la collaboration constitue un thème qui, dans un pays comme la France, évoque irrésistiblement l’accusation de collusion inavouable avec l’extrême-droite. Il apparaît chez Y. C. comme son principal reproche contre C. Castoriadis. Cela mérite une remarque en passant : Y. Coleman a eu sa période « établi », en travaillant quelques années dans le personnel au sol d’Air France. Et... il a été lié au syndicat CFDT ! Il dira, à la manière de Lutte Ouvrière, qu’il ne s’agissait que d’utiliser des commodités pratiques sans cautionner la bureaucratie, etc. Mais ce genre de radicalisme « vertueux » présente presque toujours de telles contradictions dérisoires. En quoi serait-ce moins “compromettant” que d’accepter de jeter quelques bouteilles à la mer dans des publications point trop marquées politiquement ? (Voir NPNF n° 6-7, entretiens avec M. Tardieu, pour cette activité à Air France) D’ordinaire, le grand reproche fait par les radicaux marxistes à C. Castoriadis, c’est d’avoir été employé de l’OCDE pendant des années, même s’il n’y avait nul pouvoir de décision. Un « militant » marxiste qui m’entretint assez longuement et sur le mode de l’indignation la plus impérieuse de cette « collaboration », dut reconnaître en passant qu’il avait lui-même été employé de cet OCDE, mais ce « n’était pas pareil », car il se serait lui-même trouvé à un niveau “nettement inférieur”... Le stalinien Poulantzas, réfugié politique grec comme C. Castoriadis, était plus direct dans ses accusations (non publiées) : C. Castoriadis était “évidemment” un agent de la CIA. Quand on veut dénigrer, il faut le faire massivement et sans état d’âme. C’est un vieux principe de la calomnie totalitaire : plus c’est gros...


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