Il est fort regrettable que le texte mis en lien ci-dessous par Yves Coleman (en réponse à notre introduction générale de la brochure) n’incite en rien à un débat sur le fond de la question à partir d’une tentative de compréhension de nos positions : Il se borne, sans réelle argumentation, à faire feu de tout bois, ce qui entraîne des contresens en série, de navrantes approximations et de franches contradictions. Le texte a ainsi une désagréable tonalité inquisitrice et de fort relents relativistes, à tel point qu’un groupe tunisien de nationaux-islamistes l’ont immédiatement traduit en arabe et diffusé...
Il est évident qu’une réponse conséquente de notre part ne saurait tarder, autant pour répondre aux calomnies que pour faire connaître nos positions, qui provoquent toujours le même réaction défensive chez ceux qui n’ont pas lu de textes de fond sur le sujet. L’étonnant étant qu’ici l’auteur Y.C. dit avoir lu trois livres de C. Castoriadis, dont chacun renferme quand même de quoi contredire la quasi-totalité de ses « arguments »...
Ainsi on lira d’abord parmi les textes de incriminés, ceux en ligne :
Quelques exemples. Y.C. écrit :
« Si l’on cherche une « tradition d’émancipation » comparable à celle du mouvement ouvrier occidental, on n’en trouvera pas ni dans l’Amérique latine catholique, ni dans l’Asie bouddhiste ou hindouiste ni dans l’Afrique subsaharienne, polythéiste ou animiste. La prégnance de l’islam n’explique donc pas tout, voire n’explique rien du tout, en matière d’inégalité du développement du capital et de ses fossoyeurs prolétariens. »
Castoriadis, ou d’autres dont nous, n’ont jamais dit que seul l’Islam était incompatibles avec des mouvements d’émancipation forts : ce qui est en cause, c’est toutes les religions, c’est le principe religieux lui-même, comme C. Castoriadis le dit dans un extrait que Y.C. cite lui-même... L’idée se discute, mais il n’y a en tous cas nulle fixation sur l’Islam, contrairement à ce que sous-entend l’argument. Et il n’est pas questions d’éviter d’en parler : non seulement c’est un cas d’école, mais il revêt une importance particulière de part sa proximité géographique, son imbrication avec l’histoire et la société française, son importance géopolitique et son actualité... sans parler des soulèvements arabes, dont il est question !
De la même manière :
« et si l’on se livrait à cet exercice [se demander où et quand le germe démocratique est apparu] nécessitant des connaissances encyclopédiques et la maîtrise de très nombreuses langues (un seul exemple : la production historique de la Chine sur elle-même avant 1949 dépasse en volume tout ce que l’Occident a produit sur lui-même depuis ses origines), je ne suis pas convaincu que le résultat de ces recherches titanesques aurait beaucoup d’intérêt… ou qu’il ne serait pas remis en cause, chaque fois que les connaissances progresseraient. »
Là, c’est tout simplement le principe même de la connaissance historique qui est dissous... Dans ce domaine (comme dans beaucoup d’autres) tout résultat est provisoire, et le savoir évolue en fonction des données recueillies. C’est une évidence. De quand datent les premières villes ? Le monothéisme ? L’agriculture ? L’écriture ? L’Etat ? La bureaucratie ? En attendant d’avoir décrypté tous les documents humains, et fouillé tous les sites archéologiques, il faut bien avancer des conclusions provisoires... C’est une évidence - et un des principe de la modernité. On peut appliquer ce même principe au XXe siècle : tous les témoins de la révolution russe n’ont pas été interrogé, des documents ont été perdus ou détruits, etc. : on ne sait pas tout... A suivre l’auteur, on ne pourrait rien dire : il faudrait attendre La Vérité... C’est absurde, d’autant plus qu’il ruine ainsi ses propres positions.
Dernier exemple :
« Voilà qui met singulièrement à mal les affirmations de Castoriadis sur l’exceptionalité gréco-occidentale et sa civilisation qui se serait développée en vase clos, sans aucune influence arabo-musulmane. »
Il n’a jamais été question de vase clos. Rien que le terme « gréco-occidental » le montre bien : la Renaissance s’est appropriée la culture grecque antique, qui n’avait, dans sa globalité, pour ainsi dire pas grand chose à voir avec le christianisme médiéval... Et La Grèce antique est la fille de l’Egypte et de la mésopotamie puis de la Perse de l’époque... La civilisation arabo-musulmane est aussi l’héritière de la Grèce, de l’empire byzantin et des deux monothéismes... Toutes ces influences sont réelles et n’ont pas empêché, au contraire, chaque civilisation de développer des singularité exceptionnelles. Tout cela peut faire débat, mais ce qui est certain, c’est que dire qu’il y a eu importation ne veut pas dire dépendance : comme pour un individu, la construction de sa personnalité passe par des influences massives et multiples et ça n’empêche pas chacun d’être une personne unique...
Bref.
On peut multiplier ce genre d’exercice à partir de ce texte très polémique mais certainement trop vite rédigé. C’est très dommage parce que cela ne facilite guère le débat de fond en partant dans tous les sens - a moins que ce ne soit délibéré. Si pour chaque idée discutée, il faut en préciser dix autres, etc. on ne va pas très loin dans la compréhension des points de vue, on décuple au contraire les incompréhensions, qui pro quo, etc. Tout cela alimente une confusion dont notre triste époque n’a guère besoin. Sans parler des « inexactitudes » factuelles (Castoriadis n’est pas apprécie des post-modernes, il n’élimine pas « toutes les tares » de l’occident (!), a consacré une partie de sa vie a étudier le totalitarisme, etc...). On peut le critiquer sur bien des points (par exemple l’absence de travail sur le nazisme cf. http://www.magmaweb.fr/spip/spip.ph...), mais la calomnie est une hydre toujours renaissante (on trouvera quelques éléments de réponse à des bêtises qui ont la vie dures ici : http://www.magmaweb.fr/spip/spip.ph...).
En attendant d’aller plus loin, il n’est pas difficile de trouver sur ce site quelques éléments permettant le rétablissement d’un certain bon sens.
Quelques textes d’autres auteurs :
...parmi ceux que l’on peut trouver à partir des mots-clefs « inter-culturel » ou « relativisme »
Et, contre le relativisme, qu’il soit philosophique... http://www.magmaweb.fr/spip/spip.ph... ...féministe... http://www.magmaweb.fr/spip/spip.ph... ...ou militant. http://www.magmaweb.fr/spip/spip.ph...
Enfin, sous forme d’initiation, une copie de classe terminale (qui mériterait encore quelques corrections), sur un très bon site de philosophie : http://ekklesia09.blogspot.com/2010...
Q.
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