Menacer Zineb (2/3)

L’imaginaire de l’islamisme ordinaire
vendredi 12 février 2021
par  LieuxCommuns

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Menacer Zineb — L'imaginaire de l'islamisme ordinaire
Menacer Zineb — L’imaginaire de l’islamisme ordinaire
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II – Dénis et dénigrements

« Ne discutez avec les ’Gens du Livre’ [juifs et chrétiens] que de belle manière
sauf s’ils sont injustes. » (29-46)

Face à une Zineb qui ne cède rien à ces assignations identitaires et persévère dans son apostasie argu­mentée malgré l’évidence de sa « race musulmane », l’islamiste ordinaire doit mobiliser des moyens suscep­tibles de restaurer l’intégrité du dogme.

Mais, ce faisant, il se trouve en face d’une authentique impasse car rien, dans ses Textes de référence, ne le lui permet de manière univoque. Bien pire : toute lecture sacrée le renvoie à une identité profondé­ment marquée par la soumission, le châtiment et le rejet obsessionnel des Autres. Les Autres : chrétiens, juifs ou polythéistes, bien sûr, mais aussi hérétiques, mécréants, sceptiques, femmes et, évidemment, apostats. Pour Daniel Sibony [1], psychanalyste arabisant d’origine marocaine, la violence spectaculaire du contenu littéral des textes musulmans est une véritable malédiction qui frappe le croyant, un Grand Secret qu’il doit garder pour ne pas avoir à en assumer la charge, sachant qu’il ne peut ni s’extraire de sa généalogie qui l’arrime aux Textes, ni, bien entendu, en modifier le sens [2]. Nul besoin d’érudition pour toucher du doigt ce Grand Secret : il suffit de se remémorer les éléments biographiques officiels de la légende de Mahomet, dont l’adoration définit le troisième monothéisme.

Cet enfermement musulman dans sa malédiction originelle, l’occidental ne veut généralement pas le voir et, pétri de culpabilité narcissique, pour reprendre les termes de D. Sibony, prend la faute sur lui : si l’islam pose tant de problème, c’est de la faute de l’Occident, sa supériorité, son racisme, son histoire, sa colonisation, etc. À cette posture néo-chrétienne s’emboîte providentiellement une sorte de complotisme victimaire musulman, dont il sera question plus loin, et une spirale infernale se forme dont l’islamo-gau­chisme est une des formes les plus pures [3].

Zineb vient rompre cette entente tacite, et doublement : elle refuse d’un côté de passer sous silence l’intolérance et la violence islamique dans laquelle elle a grandi – et ne le peut d’ailleurs plus, puisqu’elle en est aujourd’hui la cible par fatwas interposées – et rejette de l’autre la culpabilité occidentale si paternaliste qui enfonce les maho­métans dans ce double bind pathologique où ils sont enfermés, générateur de folie et de violence. Face à cette offensive dévastatrice menée par l’apostate, qui allie la connaissance intime de l’univers mental de l’islam et l’adhésion revendiquée à l’universalisme moderne, les islamistes ordinaires répondent sur ces deux fronts : lui refuser la moindre connaissance des Textes ou de la réalité des sociétés musulmanes et la renvoyer à la figure éprouvée de la dépravation occidentale – qui ne saurait être qu’occidentale, bien entendu. Déni d’un cô­té, dénigrement de l’autre.

1 – Dénis

« Si vous ne vous lancez pas au combat, Il vous châtiera d’un châtiment douloureux
et vous rempla­cera par un autre peuple. » (8-39)

Zineb ne saurait donc pas de quoi elle parle. Ses raisons, arguments, documents ne valent même pas la peine d’être examinés : elle se trompe, tout simplement, ignore, confond, affabule.

Dédouaner l’islam

« Aujourd’hui, j’ai rendu votre religion parfaite ; j’ai parachevé ma grâce sur vous ;
j’agrée l’Islam comme étant votre religion » (5-3)

Ainsi, pour Amine, « Vous debater entre vous sur les musulmans pas sur l’islam zineb insulte les mu­sulmans pas l’islam » ; ce serait les croyants, les fautifs, d’une mauvaise pratique d’une religion parfaite et inaltérable. Un autre Amine poursuit le raisonnement : « C’est l’être humain qui est sombre pas les mu­sulman » ; les fautes, errances ou erreurs commises au nom de l’islam ne renvoient, au fond, qu’aux tares communes à tous les êtres humains. Pour Kamal : « Zineb est une jeune femme qui ignore totalement le sujet dont elle débat. L’Islam est absolument autre chose que ce que décrit Zineb. Elle est outrancière et hors sujet ». Critiquer l’islam n’aurait ainsi pas de sens : nous n’avons affaire qu’aux phénomènes, les musulmans et leurs réalités ; l’essence des choses, l’islam, demeure hors d’atteinte, inatteignable, imma­culé, donc incritiquable. CQFD. Il faut souligner fortement, sans malheureusement pouvoir s’y attarder ici, que cette ligne de défense, qui relève de l’accusation que l’on pourrait quali­fier d’ignorance ontologique, est identique à celle qu’utilisaient les totalitarismes [4] : le communisme – ou le national-socialisme – n’est que ce vers quoi tend le régime, on ne peut donc juger l’un à l’aune de l’autre. Et l’idéolo­gie est sauve.

Mal comprendre l’islam

« Il dit : « La science n’est qu’auprès d’Allah. Je vous transmets cependant
le message avec lequel j’ai été envoyé.
Mais je vois que vous êtes des gens ignorants. » » (46-23)

D’ailleurs, Rose Noire nous le certifie : « l’islam n’est pas une ideologie c une religion de paix et d’amour et il faut connaitre pour en parler alors que madame je sais tout fabule et invente ». Même chose pour Assia (Tananarive) : « tu ne sais rien en l’islam et le coran tu doit ferme ta bouche au lieu de dire n’importe quoi » ; Houari : « ta rien compris ta rien lu en islam ta pas lu les preuves du coran ta rien lu ta rien acquis » ou Fouad : « connait rien a l’islam pauvre conne ». Les insultes pleuvent : «  impos­teur  » (Arilas de Villefranche-sur-Saône) ; « inculte...!!! » (Kouider) ; « prétentieuse sans aucune compétence intellectuelle » (Smain) ; « Vous êtes une idiote qui ne maîtrise ni les sujets qu’elle aborde, ni la compréhension et la to­lérance. » (Rachid). Pablo (Paris) s’essaie à l’érudition : « Même le philosophe nitchse [Nietzsche] en disant dieux est mort avait plus de respect aux nuances des croyances des personnes que vous l’êtes  ». Toufik N. conclut : « Putin ferme ta bouche a tout jamais laisse les musulmans tranquil tu comprends rien a l’Is­lam ».

Tout ignorer

Chacun doute de ses compétences. Zineb a grandi au Maroc et y a suivi des cours de religion durant toute sa scolarité jusqu’au Lycée et compte parmi son proche entourage des femmes musulmanes dont certaines voilées mais, pour Kamal : « les femmes voilees sont pas des terroristes nom­breuses d’etre elles pourraient vous eduquer et vous apprendre » et pour Faty « elle est une vraie igno­rante cerveau vide sait que hurler elle n’a même pas un jour lu les règles coraniques vraie idiote voilà en bref ». Arabophone de naissance, diplômée en langues étrangères appliquées et ayant enseigné l’arabe littéral à l’université française d’Égypte ? Sultan en doute fortement : « qu’elle lie la langue littéraire arabes ,je ne pense pas car elle n’a pas l’air de connaître l’islam du tout puis elle n’a aucune compréhensions de l’islam si vraiment elle lie arabe car je pense pas !! ». Originaire du Maghreb, ayant voyagé au Machrek, au Poche-Orient et dans les pays du Golfe ? Farid n’en a cure : « plutôt va voir dans les pays arabe si elle son soumise y’a des voiler des limite dévêtu et personne ne dit rien à personne va a Dubaï Abou Dhabi etc… ». Quant à son cursus en sociologie des religions, « Étude de théologie mdr mdr [mort de rire] » iro­nise Pablo (Paris) et Myriam (Nice) confirme : « je vient de finir mon année à l’université et tt le monde est d’ac­cord même les profs a qui j’ai montré la vidéo [5] et il vous on trouvé conne est surtt [surtout] ignorante vous dite connaître l’islam et l’avoir étudié mais mon cul c’est des connerie ».

Bien peu de contre-arguments viennent étayer la thèse d’une ignorance crasse et d’un illettrisme de Zineb concernant l’islam. Seuls émergent quelques rectificatifs géopolitiques édifiants, comme celui de Sultan « elle parle de l’Iran [logo du drapeau iranien] mais faut savoir pour les gens qui ne sont pas au courant se ne sont pas des Musulmans déjà ses des chiites il ne font pas 5 prière par jour il prie comme les juifs et ils sont comme les deux doigts de la main les chiites et les sioniste ses des frères dans tous les sens du terme donc ». Il précise ailleurs, avec la même clairvoyance : « Ne dites pas que les libanais sont PAS des Mu­sulmans car Ses FAUX ses des juifs Ses tout !!!! »…

Tautologies

« Il n’y a de Dieu que Dieu et Mahomet est son prophète »

Mais, foin d’arguties, il n’y a guère que Yassine (Bruxelles) qui rappelle les fondamentaux de la reli­gion musulmane : « Renseigne sur ce qu’est l’Islam avant de pouvoir te prononcer. Notre bien aimé pro­phète que la paix d’Allah soit sur elle lui nous a toujours enjoins à la bienfaisance que ce soit envers nos proches, mais également envers le musulman et le NON MUSULMAN.  » On pourrait certainement en discuter, mais il ajoute : « Avec un tel comportement sain, tout personne dotée de raison ne peut qu’ac­cepter l’islam comme religion »… La rigueur du sophisme sous-jacent à ce raisonnement et sa popularité obligent à s’y attarder : la tolérance de l’islam pour les Autres serait telle que sa supériorité devrait provoquer sans dis­cussion leur conversion immédiate, donc leur disparition en tant qu’Autres. Leur refus ne pourrait donc s’expliquer in fine que par la perversion, ou de la possession – d’où une intolérance justifiée à leur encontre… Parfaite paraphrase de Cl. Levi-Strauss : « Plutôt que de parler de tolérance [musulmane], il vaudrait mieux dire que cette tolé­rance, dans la mesure où elle existe, est une perpétuelle victoire sur eux-mêmes [les musulmans]. En la préconisant, le Prophète les a placés dans une situation de crise permanente, qui résulte de la contradic­tion entre la portée universelle de la révélation et l’admission de la pluralité des fois religieuses. Il y a là une situation « paradoxale » au sens pavlovien, génératrice d’anxiété d’une part et de complaisance en soi-même de l’autre, puisqu’on se croit capable, grâce à l’Islam, de surmonter un pareil conflit. En vain, d’ailleurs : comme le remarquait un jour devant moi un grand philosophe indien, les musulmans tirent vanité de ce qu’ils professent la valeur universelle des grands principes : liberté, égalité, tolérance ; et ils révoquent le crédit à quoi ils prétendent en affirmant du même jet qu’ils sont les seuls à pratiquer. » [6]

Lafdel (Strasbourg) convoque l’étymologie pour justifier son refus d’une laïcité qui serait autre chose qu’une étape dans l’islamisation d’une terre de prédication (Dar el daw’a) : « Islam veut dire soumis à dieu donc im­possible de se soumettre à autre chose ». R. T. Erdogan était plus stratège en déclarant, en 1996 : « La dé­mocratie c’est comme un tramway, une fois arrivé au terminus, on en descend ».

L’ignorance de Zineb de ces évidences premières la désigne comme ignorant tout de l’islam, et c’est Nadji qui nous fournit le postulat tacite de toutes ces interventions : « Sale pute va, la meuf elle ne sait même pas parler elle ne fait que de crier. Sur ce plateau normalement personne ouvre sa gueule puisque personne ne connaît notre religion ». Voici l’argument décisif et le dénouement de toutes ces accusations d’amateurisme crasse : au fond, il n’y a qu’un musulman qui peut parler de l’islam. Lui seul le connaît puisqu’il y adhère. Même un ex-musulman ne pourrait rien en dire, puisqu’il en est sorti… Cercle de fer.

Finalement, il n’y a que Lalgéroise, bien seule, pour reconnaître les compétences de Zineb ; « Tu connais très bien l’Islame  » – pour s’en désoler : « mais tu fait que de le salir c triste »…

Possession

« Les croyants combattent dans le sentier d’Allah, et ceux qui ne croient pas
combattent dans le sen­tier du Tagut [la mécréance].
Eh bien, combattez les alliés du Diable, car la ruse du Diable est certes, faible. » (4-76)

Que Zineb argumente contre le dogme mahométan alors qu’elle le connaît si bien est littéralement in­concevable puisque la supériorité intrinsèque du message coranique devrait, en toute logique, la faire adhérer sans réserve. Cette position impossible pour le croyant sème le trouble, le doute, le conflit intérieur, signe de l’ir­ruption de l’irrationnel, de l’étrange, du Diable.

Ainsi, les références au Malin abondent. C’est Hacen qui lance un « Ferme la vieille sorcière tu ra­conte que des bêtises » ou un Ramzy qui suppute : « Salut zineb vous êtes le frère de Eric Zemmour !… Pour[quoi] vous parlez pas sur les Juifs comme vous parler sur les musulmans Les satanisme ils sont gentils ». Mais c’est surtout Amine : « Tu as vendu ton âme au chetan [Diable] » ; GrandTheftoto : « elle a choisi son camp le diable » ; Linda (Salon-de-Provence) : « le. diable en personne... » ; Zaza :«  Zineb glawi [testicule] le diable en personne caché dans le corp d’une femme » ou Narin : « elle est possedée pat un jinn [esprit malfaisant] », etc. Nadia O. ironise : « tu es un démon ou un djin ? Non c bon j ai ma réponse les 2 » et Mustapha conjure : « Avocat du diable, tu pue l’enfer !  »… Vade Retro

On retrouvera ces références à l’enfer et aux châtiments plus loin, lorsqu’il sera question pour les possédés de l’islam de trouver une solution au « cas Zineb »…

2 – Dénigrements

« Comment Allah guiderait-Il des gens qui n’ont plus la foi après avoir cru et témoigné que le Messager est véridique, et après que les preuves leur sont venues ?
Allah ne guide pas les gens injustes. Ceux là, leur rétribution sera qu’ils auront sur eux
la malédiction d’Allah, des Anges et de tous les êtres humains. » (3-86, 87)

Dans un registre plus laïque, on retrouve dans les commentaires et messages d’internautes quelques tentatives d’explications à cette dissidence dont l’irrationalité ne peut trouver source que dans une autre irrationalité, celle de la folie, de la dépravation, de la prostitution (l’homosexualité, mobilisée s’il s’agit d’un homme, est ici totalement absente alors que férocement haram). Accusations qui sonnent familière­ment aux oreilles de celui – et surtout celle – qui révèle à ses proches son affranchissement des dogmes mahométans.

Folie

Pour certains, l’attitude critique de Zineb envers l’islam ne peut s’expliquer que par une éducation particulière, ou un traumatisme passé : le politique, finalement, ne serait que le personnel, l’intime, le mysté­rieux.

Bienveillant, Younesse (Monteux) ne comprend pas : « Je vous aime en Islam. Qu’Allah te protège et nous guide, Amine.  ». Puis ; « J’aimerai discuter avec vous, je comprends pas cet acharnement sur l’is­lam. J’espère que personne ne vous a fait de mal. Allah m3ak salam [qu’Allah t’apporte la paix] ». Perplexité, également, de Nelsongana : « j’aimerais bien connaître son enfance car elle a été élevée au Maroc mais sa haine des musulmans et des arabes est vraiment vraiment vraiment vraiment vraiment très haut niveau  ». Sami (Paris) vit aussi dans le même monde enchanté : « Mais l’Islam tu la critique à lon­gueur de journée avec haine et tu dis qu’on peut pas la critiquer lol je sais pas ce qui va pas ds ta vie pour avoir une haine aussi grande ». Sow hasarde quelques hypothèses : « j’ai l’impression que son ’combat ’ est motivé par un certain nombre de facteurs dont entre autres : les attentats de Charlie Heb­do, et son enfance peut-être dure qu’elle a endurée. ». Bien entendu ni les uns ni les autres ne concerneraient l’islam.

Mais c’est sans doute Smain qui, à force de défendre sa foi, fournit une première clef : « j’ai 40 ans et ni dans ma famille, ni dans mon entourage , jamais !!! On ne m’a appris que le musulman doit dominé le monde ou être au dessus des autres  ». Il poursuit, témoignant sans s’en rendre compte de la nocivité d’une éducation coranique : « et si votre famille vous a appris sa, alors sa explique peut-être votre rap­port à l’autre…  »… ou le rejet de la religion.

Il ne viendrait pas à grand monde l’idée de reprocher à un ancien enfant de chœur violé par un ecclé­siastique ses quelques doutes sur la sainteté, et nombre d’ex-musulmans témoignent de conduites inter­lopes chez les adorateurs d’un Mahomet épousant une Aïcha encore nubile, puis allant éventuellement cher­cher le pardon chez la divinité, seule à même de le donner. Les conduites pédophiles et homosexuelles sont le secret de po­lichinelle du monde musulman où les mariages de très jeunes mineurs sont toujours monnaie courante, et même ou surtout au sein des madrâsa, comme le raconte R Boujedra, dans son roman La répudiation [7] : « En hiver, j’aime beaucoup somnoler et le maître n’y peut rien car je lui fait du chantage : l’année der­nière il m’a fait des propositions malhonnêtes et je les ai acceptées afin qu’il me laisse en paix… Tout le monde accepte les propositions du maître coranique : il nous caresse furtivement les cuisses et quelque chose de dur nous brûle le coccyx. Je sais que ce n’est pas grave. Les parents généralement au courant de telles pratiques ferment les yeux pour ne pas mettre en accusation un homme qui porte en son sein la parole de Dieu. ». Le romancier ajoute : « Là encore l’enfance vient d’être saccagée, trahie, vidée à brûle-pourpoint par la faute d’un adulte monstrueux ». Sans doute vaudrait-il mieux parler d’un système de croyance monstrueux qui peuple le monde de l’enfance de sévices cauchemardesques pour qui s’éloi­gnerait de la Sainte Parole [8]. Le climat de terreur qu’instaure l’éducation islamique, souvent doublé de l’oppression réelle qu’exerce un patriarcat incontesté car presque de droit divin, semble se retourner chez le croyant vers ceux qui osent cette transgression impensable et qui démentent in vivo tout l’arsenal de châti­ments soigneusement détaillés qui attendraient l’infidèle.

On préfère donc plaider le dérangement mental, comme Mustapha, pour qui le « cas Zineb » ne fait aucun doute : « Mahboula [folle]  ». Houari précise « ta complètement un grain ca ce voit a ta tétée [tête] », donc pour Assia (Tananarive) : « Tu devrais te soigner ». En URSS, on psychiatrisait les oppo­sants ; ici les musulmans cherchent dans une enfance malheureuse ou un trouble mental l’origine des vio­lences symboliques intolérables que leur fait subir l’existence scandaleuse de l’apostat.

Dépravation

« Les infidèles ne sont que souillure » (9-28)

En refusant, contre toutes les évidences jusqu’ici présentées, de rentrer dans le chemin halal de la soumission à Allah, Zineb témoignerait alors de sa nature inhabituelle, dérangée, étrange, animale. Pour SK, elle n’a « aucune personalitée » ; pour Kouider c’est une « toxico-alcoolo-mytho », une « clocharde, écœurante dégoûtante... » pour Linda (Salon-de-Provence), c’est un « bull­dog  » pour Ynes, une «  grenouille  » pour Mohamed, etc.

Mais c’est évidemment dans le registre du sexisme et de la fornication que se déploient tous les ana­thèmes, comme si la jeune femme mettait à mal toute la masculinité islamique. C’est Bilal, apparemment frustré lui-même d’une féminité qu’il juge incomplète : la « moche zineb a une voix pas du tout effémi­née », et il conclut : « elle est frustrée ». Même diagnostique pour Myriam (Nice) : « enfaite vous êtes une frustrées qui lèche les couilles au médias ect  ». Il ne pourrait y avoir que l’insatisfaction sexuelle et la nymphomanie qui mènent à l’athéisme et il est inenvisageable que bouder le phallus islamique se fasse au profit d’un autre ordre symbolique, a fortiori si celui-ci est égalitaire, y compris et surtout entre les sexes, ce contre quoi il semble que tout l’islam s’est construit. Une Zineb insoumise ne saurait donc l’être que pour une honteuse envie de pénis, traduction vulgarisée du courage dont elle fait preuve et qui ne saurait être qu’une qualité masculine. Elle ne serait alors qu’un « sac à foutre » pour Vitali alors que Toufik (Roanne) métaphorise la liberté retrouvée par l’apostat : « Espèce de non connue mal baisé ta tellement du sucer que maintenant t’aime le zeub sale chienne ». Haytham (Marrakech) synthétise élégamment bon nombre de thématiques transversales : « Nique ta mere la salope, sale juive, va brûlée chez hitler, salope sans religion, tes une honte pour tous les musulmans, dou tu parle deux, salope mal baisé, yarbi [au nom de Dieu] tu te fais violer par un sdf qui a le sida, yar­bi, Sale nazis de mes couille, vas sucer du vademecom [?], sale chienne tu veux mes boules islamique pour voir si elle explose pas dans ta bouche inchaalah [si Dieu veut] ».

Pour Houari et d’autres, c’est plus simple : c’est une «  putain  », une « sale pute » (bis repetita), etc. Le thème de la prostitution est omniprésent dans les commentaires, obsessionnellement. Et pour cause : si le plaisir pris par l’apostasie est une métaphore de la jouissance sexuelle, celle-ci ne peut que lui être déniée, et en conséquence il doit donc bien exister un partenaire qui, lui, jouit.

Prostitution

« La fornicatrice et le fornicateur, fouettez-les chacun de cent coups de fouet.
Et ne soyez point pris de pitié pour eux dans l’exécution de la loi d’Allah – si vous croyez en Allah
et au Jour dernier. Et qu’un groupe de croyants assiste à leur punition. » (24-2)

La prostituée, c’est avant tout un corps utilisé à des fins forcément pécuniaires, dont les propos ne sont que séduction trompeuse. Ainsi pour juste lucide : « mettre en évidence son corps est une obsession pour elle, c’est la seule façon pour elle d’exister aux yeux des hommes… À mon avis, elle a due énormement suée des hanches pour pouvoir ainsi s’exprimer dans ce genre de média, de grande écoute,… ». Pour Yassir elle cherche à « faire sa petite starlette de téléréalité ». Resul conclut : « tout ce qui l’intéresse c’est de faire le buzz et d’empocher un maximum d’argent. ».

Car le sexe tarifé sert bien sûr à d’autres fins que le plaisir réciproque : l’argent, voilà ce qui motive­rait in fine Zineb à quitter et à critiquer les dogmes islamiques. Isco soupire : « Et dire qu’elle fait tout ça pour avoir un bout de pain et habiter au marais ! » et Mohammed l’interpelle : « Zineb tu veut de l’argent dit le »… Nordine, mutin : « moi j aimerais savoir combien elle gagne par mois zineb ». Bref, pour Farid elle a « trop chercher à faire le buzz. t’est soumis à la Dounia [au monde] à l’argent c est ça y’a [ta] vrais soumission à toi ». Ce monde, nous dit-il, n’est que soumission.

Ayoub résume métaphoriquement : « une lécheuse de botte » et Salah se fait plus précis : « Continue à faire de la lèche aux occidentaux ». Car, comme de bien entendu, la prostituée doit bien être, en fin de compte, au service de quelques maquereaux, comme la femme l’est à son mari. Reste à savoir lesquels…

III – Complotismes

« Ainsi, Nous avons placé dans chaque cité de grands criminels qui y ourdissent des complots.
Mais ils ne complotent que contre eux-mêmes et ils n’en sont pas conscients. » (6-123)

Si pour l’islamiste ordinaire, on l’a vu, quitter l’islam dans lequel on a grandi est inconcevable et la connaissance islamique inaccessible à celui qui ne croit pas, il faut bien expliquer la conduite incompré­hensible de l’apostat. Les dénigrements et simili-diagnostics psychiatriques ont plutôt pour fonction de décourager quiconque, y compris soi-même, voudrait quitter l’Oumma – la communauté musulmane mondiale, si bienveillante qu’elle ne laisse personne s’en extraire – mais ils n’ouvrent véritablement aucune piste pour donner sens à une apostasie qui, au fond, n’en a pas, ne peut pas en avoir, ne doit pas en avoir.

À ces angoisses, l’islam historique a répondu avec une étrange constance. F. Zakariya [9], philosophe égyptien, en décrit minutieusement le mécanisme : la constitution d’un dogme indiscutable entraîne inévi­tablement l’accusation de complot envers ceux qui le mettraient en cause, étrangers ou hérétiques (les fa­meux « ennemis de l’islam »). La Vérité étant définitivement révélée et consignée, son refus est déclaré a priori inepte : il ne peut qu’être motivé par la volonté forcément cachée, forcément maléfique, de forces obscures visant à détruire l’islam en divisant l’Oumma. Pour défendre la clôture islamique contre laquelle Zineb porte des coups très durs, elle est donc accusée de servir des intérêts inavouables et de faire double-jeu. Ici encore, les parallèles avec les mécanismes totalitaires sont trop évidents pour être détaillés.

L’opportunisme

« Et ceux qui ne croient pas (à nos messagers) et traitent de mensonge Nos révélations,
ceux-là sont les gens du Feu où ils demeureront éternellement. » (2-39)

Dans la continuité de l’accusation de prostitution, Zineb est d’abord accusée de chercher l’argent et la gloire, ne se servant finalement de sa critique de l’islam que comme un fond de commerce. Bien enten­du, il ne s’agit pas ici de dénoncer en soi le star-system ou l’oligarchie médiatico-politique, puisque un Tariq Ramadan, un Yassine Belattar, une Rose Ameziane ou tous leurs acolytes islamo-gauchistes marchands de paix sociale qui sévissent depuis des décennies ne sauraient être, en miroir, mis à l’index pour avoir fait de la promo­tion de l’islam un faire-valoir personnel, financier ou électoral. C’est bien la critique de l’islam qui est en jeu, et elle seule.

Ainsi pour Ridfa « elle insulte c parent c Racine pour etre a la télé ». Bilal développe : « elle a com­pris que pour vivre convenablement il faut vomir sur l islam.. En dehors de ce sujet je pense qu’elle n’aura pas grand chose à dire, bref elle fait du plagiat pour avoir qq euros.. Une pauvre créature haineuse de l islam ». De même pour Hasffa : « se servir de l islam pour faire une reputation et une carriere car c’est le chemin le plus facile .ca c’est degueulasse » ou Elliot : « ce qu’elle fait, c’est uniquement pour vendre ses livres de haine dénué de bon sens.. C’est une pute à buzz qui veut faire parler d’elle en stigma­tisant une communauté dont elle est issue ». Tkzp confirme : « Elle fait la promotion de son livre ça vend bien en France toujours a calomnier l’islam  » et même chose pour NANNI11AW : « l’ Islam est devenu un fond de commerce ! Elle a juste un livre à vendre ( Au même titre que Zemmour ) .....! ». Assro confirme : « Elle a vu zemmour dire des conneries et prendre l’antenne a lui tout seul et pas de réaction de musulman ,pas de réponse , alors elle remet ça. ».

Quoi qu’il en soit, pour Abdel : « Tu a trouvé ton gagne pain profité sur ton peuple (…) Arrete de leur lecher le cul tu vas rien gagner ». Pour Kamal, « Elle veut faire sa place dans une loge [maçonnique] », tandis que pour Amine, « Vous êtes payer pour insulter les musulmans faire plaisirs au sioniste ». Imed joue l’ingénu : « L’islam un bon fond de commerce, ça rapporte bcp d’argent, au fait qd est ce qu’on parle du judaïsme et des rabbins [smi­ley] ».

Cet opportunisme se nourrirait aussi des circonstances. Pour Vitali, les choses sont évidentes : « Je suis catholique. Vous n’avez de notoriété que le tas de cadavres que vous avez comme ami » – a croire qu’elle l’a fait exprès… Même chose pour Kouider :« Zineb la vautour qui a fait son buzz sur la mort de ses collègues [de Charlie-Hebdo]… Une vraie cannibale en puissance… » ou juste lucide : « Évidemment après ce qu’elle a vecue, elle ne voudrait surtout pas qu’on l’oublie, d’ou cette détermina­tion sans limite, qui n’est pas sans rappeler la grande actrice Yasmine, de chez dorcel [?]… » Sans doute aurait-elle du se taire après le massacre du comité de rédaction le 7 janvier 2015, auquel elle a échappé par hasard… C’est précisément l’opinion de Yassir : « si elle s’était tue elle n’aurait probablement pas créé de travail aux policiers qui doivent la protéger au quotidien. »…

Sa protection policière rapprochée et permanente est elle-même mise en doute. Ainsi pour Resul : « pourquoi ce serait le citoyen français qui paie ses garde du corps sous prétexte quelle serait menacée. Encore une fois de l’argent littéralement jeté par la fenêtre » ou phoebe : « Elle assume tellement, qu’elle vit entourée de protection policière, si t’assume autant,arrête de te cacher ! »… Hypocrite et dissimula­trice, Zineb doit nécessairement être à la botte de quelqu’un, comme le suggère Arilas (Villefranche-sur-Saône) : « vous me rappelez cet esclave qui etait le serviteur favori de ses maitres ». Ses maîtres com­mencent déjà à émerger : les occidentaux, les Francs-Maçons, les sionistes, les Juifs…

Le complot islamophobe

« Et Nous y avons prescrit pour eux vie pour vie, œil pour œil, nez pour nez,
oreille pour oreille, dent pour dent. Les blessures tombent sous la loi du talion.
Après, quiconque y renonce par charité, cela lui vaudra une expiation.
Et ceux qui ne jugent pas d’après ce qu’Allah a fait descendre,
ceux-là sont des injustes. » (5-45)

Bien entendu, si Zineb donne autant de sa personne, ce ne peut être par conviction personnelle (même si Kari se limite à la qualifier d’«  islamophobe  »), mais bien pour participer au grand complot immémo­rial et mondial contre les musulmans, si fondateur qu’il fait presque fonction de sixième pilier de l’islam.

C’est l’avis de Pablo (Paris) : « Vous êtes la preuve d’une haine Conduite par les médias qui sont contre l’is­lam » et de Nour : « Sa présence abusive sur les plateaux démontre la stratégie belliqueuse des medias envers l islam ». Elle développe : « C est elle qui est dans l imposture en se faisant passer pour une laïque defendant les valeurs de la république alors que ce n est qu un fond de commerce bien apprécié par les medias à cause de son origine tunisienne [marocaine] dont la tres grande majorité de ses conci­toyens ne partagent pas ses analyses ni sa haine contre l’islam de manière générale. » Pour Ayoub, c’est indiscutable : « les républiques européennes sont islamophobe et qu’il veule combatte 1 islam  », comme pour Isco : « Les médias Français ont bien compris qu’il fallait mettre une femme d’origine maghrébine pour cracher sur l’islam. » Mustapha conspue une Zineb « léchant les bottes a des Français qui sûrement l’utilisent en devant de la scène, d’une idéologie islamophobe ! ». Idéologie islamophobe incontestable en France qui provoquerait, depuis 50 ans, l’ouverture d’une mosquée par semaine en moyenne et où l’islam devient la première religion pratiquée pour laquelle l’État est en passe de rétablir le concordat [10], et qui, en face de la plus grande offensive armée sur son territoire depuis 1945 riposte par un déluge de bougies, de dessins d’enfants, de peluches et d’accommodements prétendument raisonnables.

Bien entendu, les propos de Zineb auraient des répercussions criminelles : NOP lui dit « Merci pour ce qui est arrivé en Nouvelle-Zélande merci de la part des victimes continue dans 1 islamophobie ca com­mence à payer par le sang ». Nancy avance, elle, un début d’analyse : « Son job c est de monter les chré­tiens contre les musulmans. Vous connaissez les attentats sous faux drapeaux ? Faites vos recherches. Ba­taclan, Charlie, Strasbourg etc. A qui profite le crime ? Elle joue double jeu. »

En effet : à qui profite le crime ?…

Le complot fasciste ou franc-maçon

« (Et rappelle-toi) le moment où les mécréants complotaient contre toi
pour t’emprisonner ou t’assassiner ou te bannir.
Ils complotèrent, mais Allah a fait échouer leur complot,
et Allah est le meilleur en stratagèmes. » (8-30)

Djamal glisse innocemment : « comme si elle était dans un meeting d’un parti islamophobe »… Pour Amine, c’est plus clair : « Espèce de facho » tandis que pour NOP : « Fallait le dire que vous êtes mis­sionnée par la francs maçonnerie d d’ou le Rdv avec Macron et le crédo plus de laïcité liberticide  », Hay­tham (Marrakech), déjà rencontré, évoque «  hitler  » et la traite de «  Sale nazis »… Mais globalement, l’idée des apostats fachos a plus la cote chez les journalistes de l’Obs [11] que chez nos islamistes ordinaires, qui semblent préférer, et de loin, la valeur sûre du bon vieux complot juif.

Le complot juif

«  Eh bien, espérez-vous [Musulmans] que des pareils gens (les juifs) vous partageront la foi ?
alors qu’un groupe d’entre eux ; après avoir entendu et compris la parole d’Allah,
la falsifièrent sciemment. » (2-75)

La fixation sur les « juifs-ennemis-de-l-islam », déjà entraperçue, est omniprésente dans la culture musulmane. Bien loin d’être accidentelle, cette véritable obsession s’explique historiquement par l’origine judéo-chrétienne de l’islam, généalogie déniée par le miracle de la révélation Mahométaine et que les réécritures successives du Coran vont tenter de rendre imperceptible [12].

Si Zineb critique l’islam, c’est donc qu’elle est téléguidée par ces juifs qui refusent encore le statut de dhimmis. Juifs que le contexte français contemporain et le souci de donner un relief géopolitique au pro­pos, obligent à renommer « sionistes ». Mais quelques-uns des commentateurs ne semblent pas avoir complètement intégrés ces nouveaux éléments de langages, comme Amine qui évoque cette étrange « communauté sioniste » (…« pour qui tu travailles pourriture que tu est »), Ahmed qui croit savoir que « Non tu t’appelle [pas] Zineb, MAIS une JUIF Mariée avec le con TUE chez Charlie hebdo [?] », lofa qui précise que « c’est une goy au service de ses maitres » ou encore Sultan qui affirme : « Zineb ferme ta gueul avec ton nez [icône de nez] de sioniste »…

Ceci précisé, Zineb, qui a pourtant couvert l’offensive israélienne à Gaza en 2008, serait donc « Une collabo sioniste » (Rachid), « une radical sioniste » (Zayd), « une sioniste de merde » (Fouad) ou, plus carrément pour Mouloud, «  Encore une fois c les sionistes terroriste criminel qui viennent nous expliquer c quoi l’islam ». Djamal préfère les originaux à la copie : « c’est bon tu vas bientôt l’avoir ta récompense t’es une bonne chienne et BHL va te jeter un os très bientôt , si c pour entendre des insultes et des men­songes et des vociférations je préfère encore entendre Finkelkraut ou Zemmour ils font moins mal aux oreilles  ». Mounib la met au défi : « Essayez de critiquer l’État sioniste qui fait des morts tous les jours parmi les enfants palestiniens (ou bien ce sont des terroristes eux aussi) à partir de la france et vous ver­rez la liberté d’expression… » et Amine surenchéri : « pk [pourquoi] ne parlez vous pas des sioniste qui tue , Israël qui tue , la France qui commet des crimes contre l’humanité et qui ds se monde à l’arme ato­mique ? Les musulman n’ont pas l’atomique car il ne font pas la guerre pour pilier les pays. Charlie Heb­do c’est de la carotte toute les attentas c’est du montage tout les français le savent comme celui de Stras­bourg [de décembre 2018] quand on sais que mr castàner a rencontrer mr netayaou avant l’attentat , les terroriste c’est Israël et tout les complotiste allié dont la France ».

Le retournement est connu et semble incontestable : si l’islam est indiscutable, tout ce qui se fait de mal en son nom est fomenté par une conspiration malveillante. C’est ici la France judaïsée au service de l’État d’Israël, dont Zineb ferait le jeu… C’est la thèse condensée par MmM : « Je croirais en la laïcité quand elle sera séparée du sionisme !!!!!!!!!! » à laquelle Fouad répond que « l’islame passe avant tout avant cette republique sioniste »…

IV – Les « révélations » de l’automne 2020

« Ceux qui ont vécu avant eux, certes, ont comploté,
mais Allah attaqua les bases mêmes de leur bâtisse.
Le toit s’écroula au-dessus d’eux et le châtiment les surprit
d’où ils ne l’avaient pas pressenti. » (16-26)

À l’automne 2020, un islamiste fiché S, Driss Yemmou, alias Idriss Sihamedi, président de l’association salafiste Baraka City dissoute depuis, prétend faire sur Tweeter des « révélations » sur la vie privée de Zineb : les éléments principaux sont la possession d’un riad dans son pays d’origine, le Maroc, des séjours à Dubaï et un mariage avec un banquier converti à l’islam et travaillant pour la finance islamique à la banque Rothschild [13]. Sous le hastag #BalanceZinebElRhazoui, les commentateurs islamophiles s’en donnent à cœur joie durant quelques semaines, et leur analyse mériterait un nouveau travail que celui ici esquissé.

Travail nouveau, résolument, car les attaques, déjà hétéroclites, ont alors changées d’angle et réfutent purement et simplement la plupart de celles étudiées ici : Zineb ne renierait plus sa race ni ne trahirait ses origines dont elle serait d’ailleurs ignorante, au contraire, elle en profiterait hypocritement par des attaches et des allers et venues entre la France et des pays musulmans ; son discours anti-islam ne serait plus guidé par la recherche éperdue d’argent, puisque, à l’inverse, sa fortune la rend indigne de cagnottes de soutien comme de protection policière ; enfin ses motivations ne seraient plus l’« islamophobie » française ou occidentale ni des idées d’extrême-droite et encore moins une allégeance aux sionistes, puisqu’il n’est plus pointé que l’incohérence et le « double-discours » d’une apostate entretenue par la finance islamique et vivant en terre d’islam. On notera sur ce dernier point que la référence à la « banque Rothschild » offre pourtant un boulevard aux spéculations déjà vues sur le « sionisme » de Zineb, mais il est obstrué par son association gênante à la « finance islamique » – qui reste un tour de bonneteau permettant aux mahométans les prêts à intérêts que la légende réservait… aux Juifs…

Ce retournement des attaques contre Zineb illustre parfaitement la mécanique de la haine ici décrite, la construction du mauvais objet contre lequel tout est mobilisable : de nouvelles « révélations » en feraient-elles une habitante de Trappes ou de Monaco, détentrice d’un seul livret A ou de multiples comptes au Luxembourg, mariée à un salafiste ou à un Loubavitch que ses détracteurs y trouveraient l’évidence irréfutable de sa nature ontologiquement mauvaise. Car tout cela n’est évidemment que prétexte, habillage, rationalisation d’une culpabilité décrétée depuis longtemps par l’apostasie argumentée de Zineb, avec laquelle il faut en finir puisque sa simple existence souille le corps entier de la Oumma.

(.../...)

Dernière partie disponible ici


[1Daniel Sibony ; Islam, phobie, culpabilité (Odile Jacob, 2013)

[2L’interprétation (ijtihad) des textes, si communes dans la tradition judéo-chrétienne, est hautement problématique dans l’islam sunnite, le Coran (dit incréé) étant parole de Dieu Lui-même non médiatisée par l’esprit humain.

[3Voir « Les racines de l’islamo-gauchisme » dans Islamismes, islamogauchisme, islamophobie. Seconde partie, op. cit., ains que « Il y a des affinités anthropologiques très profondes entre un gauchiste et un musulman », transcription de l’émission Offensive Sonore du 7 octobre 2016 sur les ondes de Radio Libertaire (89.4)

[4Cf. « Islamisme, totalitarisme, impérialisme » dans Islamismes, islamogauchisme, islamophobie. op.cit.

[5Vidéo You Tube « « Une Grande Gueule recadre Zineb El Rhazoui » op. cit.

[6Cl. Levi-Strauss ; Tristes tropiques [1955], Plon, 1984, p.481. On pourrait juste ajouter qu’il s’agit là de la contradiction fondamentale de toute religion révélée, hébraïque y compris (Cf. M. Gauchet, Le désenchantement du monde, Gallimard 2012, p. 227), ce qui n’a rien de surprenant lorsqu’on connaît la généalogie historique de l’islam – cf. « Islamisme, totalitarisme, impérialisme », op. cit. & ici n. 24.

[7Denoël, 1970.

[8Cf. Adonis, Violence et islam, Seuil, 2015.

[9Fouad Zakariya ; Laïcité ou islamisme, les arabes à l’heure du choix. (La Découverte / Al Fikr, Paris / le Caire, 1991)

[10Cf. les négociations durant l’hiver 2019 – 2020 entre le gouvernement français et les différents regroupements (l’ex-Uoif, L.E.S musulmans, l’AMIF – tous très proches des Frères Musulmans) prétendant représenter les musulmans sur le territoire français, afin d’encadrer le culte islamique, notamment financièrement.

[11Voir l’article de Célia Mebroukine et Timothée de Rauglaudre « #ExMuslims, ces anciens musulmans qui fustigent l’is­lam », 24 novembre 2019 sur le site https://www.nouvelobs.com.

[12Ainsi ces étranges « nazaréens » qui peuplent le Coran et l’entourage de Mahomet. C’est la thèse vers laquelle convergent tous les travaux d’historiens de l’islam médiéval. Cf. pour une synthèse Olaf ; Le grand secret de l’islam (2015).

[13Cf. « Le « double-discours » de Zineb El Rhazoui épinglé par le président de BarakaCity » sur le Site Yabiladi le 29 septembre 2020 (https://www.yabiladi.com/articles/d...)


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