Points de repères sur la crise économique en cours

dimanche 13 juin 2010
par  LieuxCommuns

Texte extrait du bulletin de G.Fargette « Le crépuscule du XX ième siècle », n°21, Novembre 2009

  • Les dérèglements qui ont éclaté en 2007 et qui ont envahi la sphère financière en 2008 proviennent d’un effet de spéculation illimitée. Les « subprimes » qui ont provoqué la ruine des plus pauvres sont, en soi, une mécanique de cavalerie, vingt à quarante fois plus ample que celle de l’escroc B. Madoff. Mais le rôle des dérégulations a été essentiel puisque ces actifs « toxiques » ont contaminé l’ensemble de la finance mondiale, au point que c’est tout l’édifice bancaire qui vit désormais sous perfusion de l’Etat, et que l’on parle de « banques-zombies ».
  • Cette « crise » (comme moment de vérité) fait suite à la longue succession de chocs économiques et financiers antérieurs (1987, 1993, 2000), pour ne parler que de ceux qui ont mis en jeu les secteurs les plus centraux des processus économiques internationaux. Leurs effets n’ont été endigués qu’en étendant les défauts initiaux, grâce à des subventions immenses. Ces failles se sont, à chaque fois, aggravées.
  • Cette succession de sursauts et de retombées brutales, artificiellement endiguées par une politique de crédits illimités, n’est pas terminée. Depuis l’hiver 2008-2009, il apparaît que la garantie des Etats permet à la sphère financière de fonctionner en mode autonome. L’absorption de substance par ce secteur-clé des oligarchies continue et s’aggrave mécaniquement.
  • Le contexte du pic de pétrole condamne les sociétés industrielles à subir des contraintes énergétiques de plus en plus dévastatrices. Aucune adaptation ne pourra se faire de manière anticipée. A peine le monde du travail, pour qui la crise ne fait que commencer, verra-t-il se dessiner une amélioration, d’ici quelques années, qu’un nouveau plongeon se produira.
  • La thématique de la « croissance verte »promet une solution indolore. A quelques détails techniques près, dont les spécialistes ont à s’occuper, le monde continuerait comme il va. Mais ce type de leurre a déjà été formulé, dans tous ses aspects à la fin des années 1980, sans aucun effet pratique. Cette thématique escamote le rapport entre économie et puissance.
  • Tous les débats sur le danger climatique servent à définir une atmosphère idéologique : les dirigeants font mine de se préoccuper de ce danger, mais ils savent tous que les dirigés n’accepteront jamais la moindre limitation de consommation. Il suffit de voir les réactions à la minuscule taxe carbone décidée à l’automne 1989 pour comprendre que toute annonce de ce genre se heurte à un refus profond et viscéral.
  • Seule l’égalisation drastique des conditions sociales permettrait une stratégie d’ensemble rationnelle de préservation de la biosphère. Il faudrait que les couches dirigeantes donnent l’impression de ne plus exister en tant que telles, pour que les masses au niveau de vie de plus en plus dégradé commencent à consentir à certaines limitations. Seule une tragédie gigantesque, guerre, épidémie, famine, et sans doute les trois à la fois (car en général, c’est un tryptique de l’histoire humaine) produirait les conditions d’une telle résignation.
  • Le plus probable, mais l’histoire humaine est toujours riche en surprises et en création, c’est le surgissement d’une idéologie de la pénurie nécessaire pour le plus grand nombre. De même que la référence républicaine a triomphé à partir du moment où elle s’est dissociée de la question sociale (selon la prédiction lucide de Mme de Staël), de même les références écologistes deviendront prédominantes si elles réussissent à devenir une idéologie quasi religieuse justifiant la pénurie pour le plus grand nombre.

(Guy Fargette, le 30 novembre 2009)


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