Comment devenir un bon dirigeant politique en dix leçons ?

samedi 20 juin 2009
par  LieuxCommuns

Comment devenir un bon dirigeant politique en dix leçons ?

Philippe COUTANT

La méthode Assimil-vite-la-politique nous permet de publier en exclusivité quelques extraits de sa méthode éprouvée pour devenir un dirigeant politique puissant. Ceci donne des résultats efficaces pour un investissement raisonnable. Nous vous la conseillons donc.

1/ Etre un humain blanc « occidental » de sexe mâle est une condition favorable sous nos climats. L’instruction et la culture peuvent être moyenne, l’habileté politique n’est pas liée aux diplômes ni à la sagesse ou au fait d’être cultivé. On peut commencer jeune, mais la moyenne la plus courante est de 35 à 60 ans.

2/ Il est indispensable d’avoir une structure organisationnelle stable où l’importance numérique des troupes peut être une donnée importante. La durée de l’organisation est en soi un enjeu de taille.

3/ Il sait faire fonctionner et utiliser les mythes sur l’origine ou l’avenir, la puissance et la valorisation. Il remplace aisément le prêtre d’antan comme intercesseur face aux puissances spirituelles. La promesse est un horizon de sens primordial. C’est un bon connaisseur de l’âme humaine et tire profit des passions tristes des humains qui préfèrent se soumettre en ayant un petit rôle plutôt que de prendre le risque de la liberté éphémère. Il sait que l’existentiel et l’identitaire sont des points clés de l’humanitude, alors il en joue à souhait.

4/ Il s’entoure d’un cercle amical où l’affectif et la reconnaissance conforteront l’engagement des personnes proches. L’aspect « tribal » de l’économie familiale n’a pas de secret pour lui, même s’il affirme à dessein que la politique prime. Il s’efface pour distribuer des valorisations symboliques aux personnes dont il a besoin.

5/ Il profite des forces neuves des personnes qui débutent en politique en leur montrant l’énorme besoin que l’on a d’elles. La justification doit bien sûr avoir une haute valeur morale et viser au bien de l’humanité pour compenser le sacrifice militant. Comme l’usure humaine est parfois rapide, il faut toujours de la chair fraîche. Les technocrates, eux, parlent maintenant de turn-over, mais le dirigeant politique sait qu’il s’agit de tout autre chose : du merveilleux que procure l’instance symbolique collective, car le monde politique est triste et froid s’il est désenchanté.

6/ Il a toujours raison, si besoin il met « les principes » en avant, il ne reconnaît jamais qu’il a tort. Au mieux c’est une erreur d’appréciation. En cas de désaccord sur une initiative qu’il n’a pas prise lui-même le dirigeant ne dit pas qu’il est contre. Non, il crée une ambiance défavorable ou critique en sous-main et n’encourage pas à y participer. A l’inverse si il se sent en minorité il jouera de son « aura » personnelle en disant : « vous pensez ce que vous voulez, personnellement je pense que ... ». Cette tactique fonctionne à merveille. L’instinct grégaire vient au secours de la soumission.

7/ Il fait des compromis quand c’est inévitable, c’est à dire quand il ne peut diriger seul, et s’empresse de dénoncer la compromission chez les autres. Mais il connaît la valeur du rapport de force avec ses pairs en politique, car la règle c’est de se soumettre plutôt que de se démettre, comme chez les grand singes. La « fin justifie les moyens » est une méthode éprouvée ; autre précepte de base bien connu : « les ennemis de mes ennemis sont mes amis », il est ancien mais encore très efficace. En désespoir de cause il aura recours au sempiternel « diviser pour régner ».

8/ Avec l’âge vient le contrôle des instances, là il faut souvent verrouiller pour se maintenir en place et garder son pouvoir. On peut le faire de multiples façons : la maîtrise des statuts, la dramatisation émotionnelle, le recours au danger externe pour rendre plus forte la cohésion interne, l’instrumentalisation des personnes proches donc dévouées, la mise en scène du pouvoir, etc... Evidemment le contrôle des finances et de l’information sera acquis discrètement. Comme de bien entendu on réclame la transparence pour les autres et on pratique l’opacité pour soi. Le meilleur moyen étant de se rendre indispensable et incontournable par sa présence active.

9 / L’essentiel est de continuer, d’occuper l’espace, de marquer la situation, donc de faire parler de soi, on peut utiliser l’humour et même aller jusqu’à se plaindre ou se faire plaindre pour son dévouement à la cause. Au besoin on se fait rassurant devant les inquiétudes des personnes que l’on instrumentalise. De ce point de vue le dirigeant politique est un bon cadre gestionnaire, il excelle dans les ressources humaines : la bonne personne à la bonne place, la culture « maison », la valorisation de la réussite, l’évacuation des difficultés sur une victime expiatoire ou un bouc émissaire, être celui qui « sait », la pratique de la convivialité bien comprise qui en fait un humain accessible malgré son pouvoir « supérieur ».

10/ La haute idée de soi-même c’est fondamental. Partager cela avec les autres ou leur donner un motif d’exister, de se sentir libre et utile, de vibrer pour un « idéal » donne la clé du pouvoir symbolique. Partager et transmettre l’illusion sont de bonnes garanties pour que les autres se soumettent et s’en remettent à vous en politique. Face au vide du spectacle et de la marchandise proposer du sens c’est un excellent moyen de réussir en politique. Allez bonne chance les petits loups, ayez les dents longues, l’époque est aux faux-semblants, n’hésitez pas les humains sont méprisables et adorent la soumission pourvu qu’on les caresse ou qu’il aient peur.

Pour rire avant d’en mourir !

Philippe Coutant, Nantes, en Juin 1996

Copyright © 2001 Philippe Coutant, les copies conformes et versions intégrales de cet article sont autorisées et souhaitées sur tout support pour peu que cette mention soit préservée.


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