Premier commentaire, du 18 août 2011
Il est fort dommage que l’auteur ce texte ait accumulé une telle documentation pour présenter une lecture aussi simpliste de la réalité tunisienne sans donner aucune clef pour en comprendre l’évolution. On retrouve ici étonnamment les poncifs pseudo-révolutionnaires des expatriés tunisiens arrivistes du FLPT (http://www.flpt.org/), qui souhaitaient, de France, coordonner la suite du soulèvement…
Un exemple parlant est celui des “comités de de sécurité” ou “de quartier”, que la population a formé spontanément lors de la période de chaos et dissout une dizaine de jours après : Notre auteur les confond totalement avec les “comités de protection de la révolution”, créé à leur suite par les militants gauchistes pour en récupérer la légitimité et prétendre à quelques postes de pouvoir – ce qu’ils réussirent, notamment par l’intermédiaire de “L’instance nationale pour la protection de la révolution”… Compréhension bizarre de la “démocratie directe”, dont l’auteur se réclame, que de confondre des organes populaires spontanés disparus dès la fin janvier avec la permanence de leurs simulacres politiciens. Et difficile de savoir si l’appel, dans la conclusion, à leur maintien et à leur développement soit six mois après leur disparition, est de la naïveté ou de la rouerie.
On ne peut qu’éprouver un même trouble tout au long du texte lorsqu’il est question sans discernement de “mouvement populaire”, et plus particulièrement concernant les mobilisations autour de la “Kasbah” : L’activité intense des mouvances, partis et groupuscules depuis l’insurrection semble le point aveugle de l’auteur, qui peine décidément à discerner des initiatives populaires de leur récupération partisane – c’est vrai qu’on sentait déjà la discipline militaire poindre sous la rhétorique martiale du titre racoleur “La guerre sociale en Tunisie”… La dernière grande manifestation de la Kasbah de Tunis, à la mi-juillet, parle d’elle-même : elle est l’aboutissement du travail de terrain que les nationalistes et islamistes mènent depuis huit mois. Ces évidences pour tout tunisien moyen paraît hors d’atteinte pour notre “spécialiste”.
Dernier exemple, justement, la tonalité discrète du texte à propos de l’extrême-droite religieuse, décrite comme une perpétuelle victime et constamment réduite à un prétexte politique au maintien de l’ordre. L’auteur est forcé pour servir son propos de suggérer quelques éléments contradictoires (imams délateurs, islamistes chassés par la population…), mais à contre-coeur : qu’il s’agisse de la première force politique populaire et militante de Tunisie, dans la rue et les cénacles en attendant les urnes, ne semble pas cadrer avec sa vision du pays. Et que tous les émancipé(e)s tunisiens (comme égyptiens) s’y heurtent tous les jours physiquement depuis la fin de la dictature ne paraît pas lui être plus digne d’intérêt… Les premiers à dénoncer à hauts-cris la “droitisation” en France sont les mêmes qui refusent de la voir ailleurs. Les résultats des élections d’octobre ne manqueront pas de les surprendre (15 à 30% d’intention de vote pour Ennahda) – on les entendra alors invoquer la CIA.
Sur tous ces points, et d’autre, on comparera avec notre analyse, qui cherchait plus à décrire une réalité mouvant qu’à asséner un bluff démagogique : http://www.magmaweb.fr/spip/spip.ph...
L’hypothèse d’une ignorance tenace de l’auteur tombe immédiatement dès qu’il est question de notre collectif Lieux Communs (étonnamment qualifié “d’étudiants”) dont les deux brochures sur la Tunisie parues en mai sont réduites à une interview de nos camarades là-bas, et dont les propos sont sciemment déformés. Que l’auteur refuse de considérer l’impact du jeu diplomatique de la première puissance mondiale ne regarde, après tout, que ses lecteurs, mais qu’il mente effrontément sur nos positions de fond, en tentant de nous dépeindre en ex-post-néo-para-situationnistes partisans d’une conception policière de l’Histoire, jette tout de même le doute sur l’honnêteté de l’ensemble de son travail. N’importe qui vérifiera facilement en lisant tout simplement l’interview en question “Le mouvement tunisien est politique et social” du 26 janvier (et non du 28 – et qui fut suivie par quatre autres) : http://www.magmaweb.fr/spip/spip.ph...
Quant à l’affirmation que nous serions “manipulés” par Guy Fargette, c’est tout-à-fait juste, mais il nous faut préciser que sommes tout autant “manipulés” par J. C. Michéa et L. Mumford, H. Arendt et C.Castoriadis, C. Lasch et J.F. Narodetzki, quelques auteurs parmi la trentaine que compte notre site, qui ont effectivement tous travaillé à un moment ou un autre au Ministère de l’Intérieur ou à la DGSE…
Reste que discuter des idées semble toujours moins facile que la diffamation et l’insulte, lorsqu’on est fidèle à une certaine tradition politique.
Quant à Guy Fargette himself, il est effectivement haït depuis deux décennies pour des prises de positions hétérodoxes qui écornent un peu trop les dogmes gauchistes en cours. On lira par exemple, sur le gauchisme radical-chic : “Sur le ‘cauchemar de Don Quichotte” http://www.magmaweb.fr/spip/spip.ph..., ou, puisqu’il est question de géopolitique “Choc ou conflit de civilisations ?” http://www.mondialisme.org/spip.php.... Par contre il est aussi exact qu’il fut GI en Afghanistan (comme il était au SAC dans les années 60 et à Action Française dans les années 30) et qu’il co-écrit les discours de Sarkozy. Sur ce dernier point, on trouvera confirmation dans son texte “2007 : L’oligarchie s’affirme” http://www.magmaweb.fr/spip/spip.ph...
Finalement, le partage opéré par notre “français-qui-aime-bien-la-Tunisie-mais-de-loin” est, au mieux, étrange : les partis tunisiens arrivistes et l’extrême-droite musulmane ont droit à toute son indulgence, tandis que notre collectif qui les dénonce, et pour cause, ne mérite que calomnie et diffamation.
Conception singulière de l’action, du débat et de la démocratie directe, et prises de positions surprenante sur un site libertaire.
Croire que de tels procédés, habituels dans certains milieux, aideront en quoi que ce soit à l’établissement d’une société libre et égalitaire est aussi infantile que d’avoir besoin de falsifier la réalité pour pouvoir espérer en une inflexion radicale de la fuite en avant morbide dans laquelle nous sommes tous entraînés, d’un côté comme de l’autre de la Méditerranée.
Au plaisir
Collectif Lieux Communs
(Collectif indépendant de pratiques et d’analyses politiques ordinaires pour une auto-transformation radicale de la société)
« C’est un proscrit qui tient la plume, – sans doute ; mais un proscrit qui n’a été ni membre, ni officier, ni fonctionnaire de la Commune ; qui pendant cinq années, a vanné les témoignage ; qui a voulu sept preuves avant d’écrire ; qui voit le vainqueur guettant la moindre inexactitude pour nier tout le reste ; qui ne sait pas de plaidoyer meilleur pour le vaincus que le simple et sincère récit de leur histoire. Cette histoire d’ailleurs, elle est due à leurs fils, à tous les travailleurs de la terre. L’enfant a le droit de connaître le pourquoi des défaites paternelles ; le parti socialiste, les campagnes de son drapeau dans tous les pays. Celui qui fait au peuple de fausses légendes révolutionnaires, celui qui l’amuse d’histoires chantantes, est aussi criminel que le géographe qui dresserait des cartes menteuses pour les navigateurs » P. O. Lissagaray, Novembre 1876, Préface à L’Histoire de la Commune de 1871
Second commentaire du 16 novembre 2011
Bien étrange “article”, sous un titre bien prétentieux.
L’auteur promet des “Informations fiables sur la Tunisie” et se pose immédiatement en critique radical de la grande presse… pour copier-coller immédiatement une interview de France 24, en version intégrale, photos comprises ;
http://tunisie.france24.com/2011/10...
… qui tente pitoyablement de personnaliser le soulèvement de janvier, en nous invitant à espérer dans le travail de l’assemblée constituante, dominée aujourd’hui par l’extrême-droite religieuse et les partis gestionnaires (on a beau se méfier de la presse, il faut quand même se tenir au courant, ou alors sortir discuter dans la rue).
Sans parler du reportage sur les files d’attentes des élections d’il y a trois semaines (!), en provenance du blog bobo “Nawaat” (http://nawaat.org/portail/2011/10/2...)… le même qui redécouvrait un peu tard, c’est-à-dire sans risque, la démocratie directe pour tenter de faire pièce à la Bérézina électorale (http://nawaat.org/portail/2011/10/2...). N’évoquons même pas les deux vidéos particulièrement indigentes.
Qu’apprend-t-on de ce patchwork informe ? Rien qui n’éclaire sur la situation sociale ou politique en Tunisie, rien qui ne permette un positionnement clair pour ceux qui veulent partout des sociétés libres et égalitaires, rien sur le travail de fond qu’y mène l’extrême-droite dans la rue comme dans les officines.
On ne peut que s’interroger sur l’intérêt d’un tel article, qui ne semble fait que pour détourner les lecteurs français et tunisiens des questionnements actuels qui traversent le pays, dont les perspectives sont largement indéterminées. On ne peut également que se demander le pourquoi d’un tel acharnement sur notre collectif “Lieux Communs”, dont la réponse aux insultes précédentes concernant la Tunisie est restée sans commentaire à ce jour – voir ici : https://juralib.noblogs.org/de-bell...
Nous y dénoncions l’approche totalement biaisée de l’auteur, qui faisait passer les manigances politiciennes pour des mouvements autonomes de la population, tout en faisant preuve d’une étrange complaisance vis-à-vis des mouvances islamistes qui tenaient hier les rues et sont aujourd’hui aux commandes de l’Etat. Le texte, poussif et déjà décalé en son temps, apparaîtrait aujourd’hui totalement risible s’il était, sait-on jamais, pris au sérieux. Il semble que ces biais ne soient pas innocents, et nos analyses pré-électorales concernant le pays ne peuvent que les démasquer, ceci expliquant cela :
- Voir “La situation en Tunisie – compte-rendu de la réunion publique du 21 octobre” : http://www.magmaweb.fr/spip/spip.ph...
- Ou “Elections tunisiennes : entre l’oligarchie et l’islamo-gauchisme”, interview d’un camarade tunisien fin août : http://www.magmaweb.fr/spip/spip.ph...
Sans doute également, les liens que nous faisons avec le mouvement grec du printemps dernier ne peuvent que déranger un “insurrectionalisme” compulsif incapable d’appréhender la situation post-insurrectionnelle :
- “Entrée en période troublée” http://www.magmaweb.fr/spip/spip.ph...
- “Enjeux politiques et anthropologiques du mouvement grec pour la démocratie directe” http://www.magmaweb.fr/spip/spip.ph...
Au lecteur soucieux de voir ce qu’il en est des “fausses nouvelles, amalgames et rumeurs policières” (!) qui constitueraient l’essentiel de notre travail.
Quant à nous qualifier d’”infiltrés identitaires”, cela questionne quant au référencement de notre site sur “Jura Libertaire dans la rubrique “contre-culture”. Cela nous permet aussi de rappeler en passant que les extrêmes-droites du monde entier se dénoncent mutuellement, et que l’aveuglement volontaire face aux islamistes d’ici comme de là-bas rend l’accusation suspect, sinon de connivence, du moins de mauvaise conscience post-coloniale de militant de salon cossu.
On ne peut que se désoler que l’anti-fascisme de papier serve encore et toujours d’épouvantail pour se donner un semblant de consistance, et ce depuis des décennies. Quant au besoin de convoquer la figure (apparemment paternelle) de notre collectif, que nous ne pensions pas si digne d’attachement, inutile de s’attarder sur son infantilisme.
Mais peut-être est-ce là, après tout, le seul mobile de cet “article” particulièrement lamentable : tenter d’exister à tout prix, y compris par la pose du mépris, celle de l’intelligence, de la sensibilité et du travail semblant hors de portée d’un “libertaire” qui semble faire si peu de cas de la vérité et de la liberté.
Mais sans doute est-ce là trop demander, qu’une identité auto-proclamée et brandie comme un étendard implique un semblant de cohérence.
Au plaisir
Collectif Lieux Communs
« Ceux qui manquent de bonne volonté ou restent puérils ne sont jamais libres dans aucun état de la société. Quand les possibilités de choix sont larges au point de nuire à l’utilité commune, les hommes n’ont pas la jouissance de la liberté. Car il leur faut, soit avoir recours au refuge de l’irresponsabilité, de la puérilité, de l’indifférence, refuge où ils ne peuvent trouver que l’ennui, soit se sentir accablés de responsabilité en toute circonstance par la crainte de nuire à autrui. En pareil cas les hommes, croyant à tort qu’ils possèdent la liberté et sentant qu’ils n’en jouissent pas, en arrivent à penser que la liberté n’est pas un bien. »
S. Weil, 1949 ; L’enracinement, Première partie ; les besoins de l’âme ; La liberté
Dernier commentaire du 18 novembre (non publié) par le site — qui faisait suite à une réponse de l’intéressé, qu’il supprima également...
Triste époque, vraiment. Et triste destin que celui du mot « libertaire », brandi aujourd’hui par n’importe qui, qui raconte n’importe quoi.
Nous ne savions pas que donner au lecteur les moyens de se faire un avis en rendant disponibles les textes incriminés s’appelait de « l’autopromotion ». Pour nous cela se nomme la confiance dans ses propres idées et le risque de la confrontation.
Vous avez rageusement supprimé le lien qui menait à notre site, oubliant que c’est vous-même qui l’aviez mis spontanément. Il vous reste à supprimer celui qui mène à nos brochures (http://juralib.noblogs.org/2011/05/...), à vous désinscrire de notre lettre d’information, et de cessez de nous invoquer comme faire-valoir, choses qui n’ont jamais relevées que de votre libre-arbitre.
Ce dernier semble manquer singulièrement d’assise, puisque la description que vous tentez de faire de nos analyses montre que vous n’en avez pas pris connaissance. Il n’est pas trop tard pour s’apercevoir qu’elle prennent un relief particulier avec le recul du temps, et que l’invocation de l’islamisme n’était pas une lubie, mais une réalité de terrain qu’il était pourtant facile de déceler. Quant à la « décence commune » que nous invoquions comme étant le propre des sociétés incomplètement détruites par le « développement » et le « progrès », votre attitude grotesque et vos propos délirants le confirme ad nauseum, étant évidents qu’ils ne peuvent être émis que du cocon franco-français.
Ces idées sont les nôtres, affichées comme telles, et sont effectivement partagées par nombre d’auteurs, que nous citons abondamment, tunisiens y compris. Mais sans doute ne pas citer l’AFP à propos des récentes émeutes de Sidi Bouzid, organisées par un milliardaire quasi-putschiste, ou France 24, ou « Nawaat » n’est-il pas, pour vous, présenter des « informations fiables »...
Il reste bien peu de vous après tout cela. Au moins, faut-il le reconnaître, le courage de publier ce genre de commentaire, qui permet d’insinuer un peu de bon sens dans tout ce fatras.
Bien à vous
Lieux Communs
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